Le Gouvernement du Québec dépose un premier projet de loi afin de mettre en oeuvre son plan d’action en matière de régimes de retraite

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Dans notre bulletin de janvier dernier, nous vous avons présenté les grandes lignes du plan d’action du gouvernement du Québec dans le but de « corriger et redresser la situation des régimes de retraite ». Nous y avions indiqué que le gouvernement prévoyait déposer, en février 2014, un premier projet de loi afin de mettre en place un processus de restructuration des régimes des municipalités.

Chose promise, chose due. En effet, le 20 février 2014, la ministre de l’Emploi et de la Solidarité sociale, Mme Agnès Maltais, a présenté à l’Assemblée nationale le projet de loi n° 79 intitulé « Loi concernant la restructuration des régimes de retraite à prestations déterminées du secteur municipal et d’autres modifications à ces régimes ».

Ce projet de loi énonce principalement les paramètres du processus de restructuration des régimes de retraite à prestations déterminées du secteur municipal. Tel qu’il est mentionné dans ce projet de loi, le processus de restructuration vise à permettre, de façon exceptionnelle et durant une période limitée, de revoir certaines règles de ces régimes afin d’assainir leur situation financière et d’en assurer leur stabilité.

RESTRUCTURATION OBLIGATOIRE
REMARQUES GÉNÉRALES
Selon les dispositions du projet de loi, le processus de restructuration est obligatoire seulement pour certains régimes du secteur municipal, à savoir :

  • ceux qui, selon une évaluation actuarielle au 31 décembre 2013, ont un degré de capitalisation inférieur à 85 %;
  • ceux qui offrent une subvention pour retraite anticipée avant l’âge de 55 ans.

Une évaluation actuarielle sera nécessaire afin de déterminer si le degré de capitalisation d’un régime donné est inférieur ou non à 85 % au 31 décembre 2013 et cette évaluation devra être transmise à la Régie des rentes du Québec au plus tard le 30 juin prochain.

Dans les cas où le processus de restructuration n’est pas obligatoire, celui-ci peut tout de même être suivi si l’organisme municipal et les participants actifs du régime décident de s’y soumettre volontairement.

Les objectifs des parties au processus de restructuration doivent être d’assainir la situation financière du régime et d’en assurer la stabilité. Pour atteindre ces objectifs, les parties doivent négocier des mesures visant à :

  1. atteindre un degré de capitalisation minimal de 85 %;
  2. abolir la subvention pour retraite anticipée avant l’âge de 55 ans;
  3. partager 50/50 les coûts pour le service courant;
  4. abolir la prestation additionnelle prévue par la Loi sur les régimes complémentaires de retraite (la « Loi RCR »).

Certaines règles sont prévues dans le projet de loi quant à l’implantation des mesures mentionnées aux points 2 et 3 ci-dessus.

Le projet de loi énonce que les parties peuvent négocier le partage des coûts des déficits passés ainsi que la modification ou l’abolition de toute prestation prévue au régime, sauf la rente normale.

En ce qui concerne les retraités et les bénéficiaires, leurs rentes ne peuvent être réduites. L’indexation de leurs rentes peut toutefois être suspendue ou la formule d’indexation de celles-ci peut être modifiée. Pour procéder à une telle suspension ou modification de l’indexation, les retraités et bénéficiaires doivent préalablement être consultés, et aucune modification ne peut être apportée si 30 % ou plus des retraités et bénéficiaires s’y opposent.

Le projet de loi prévoit également d’autres règles importantes dans le cas des régimes pour lesquels le processus de restructuration est entrepris (de façon obligatoire ou volontaire), dont les suivantes :

  • les négociations doivent commencer et se poursuivre avec diligence et de bonne foi;
  • les excédents d’actif du régime ne peuvent être utilisés par l’organisme municipal afin de prendre un congé de cotisations, sauf si une règle fiscale l’oblige à le faire;
  • tout engagement supplémentaire résultant d’une modification apportée au régime doit être financé entièrement, et ce, dès le moment où la valeur de cet engagement supplémentaire est déterminée.

LES TROIS PHASES DU PROCESSUS DE RESTRUCTURATION
Les trois phases du processus de restructuration correspondent à celles qui sont mentionnées dans le plan d’action du gouvernement (voir bulletin de janvier dernier). Ainsi, on retrouve dans le projet de loi : la phase des négociations, celle de la conciliation et, en dernier lieu, celle de la résolution du différend par la Commission des relations du travail (la « CRT »). Le déroulement de chacune des phases du processus est encadré de façon précise dans le projet de loi.

La durée totale du processus de restructuration correspond également avec ce qui avait été annoncé dans le plan d’action. En effet, des délais de six mois sont prévus pour chacune des phases du processus. Certains délais administratifs découlant de la transition entre chacune des phases sont cependant à prévoir (par exemple, entre la fin de la période des négociations entre les parties et la nomination du conciliateur ou encore entre la fin de la période de conciliation et la transmission du rapport du conciliateur à la CRT).

LES PARTIES AU PROCESSUS DE RESTRUCTURATION
En ce qui concerne les parties au processus de restructuration, celles-ci sont, en milieu syndiqué, l’organisme municipal et le(s) syndicat(s) représentant des participants actifs du régime. Le projet de loi énonce notamment que l’existence d’une convention collective en vigueur n’empêche pas le processus de restructuration et que toute entente intervenue dans le cadre du processus ou toute décision rendue par la CRT à l’effet d’une modification à la convention collective en vigueur dans la mesure où elle en modifie les termes.

Dans le cas des participants actifs non syndiqués d’un régime de retraite, l’organisme municipal doit prendre des mesures afin de permettre à ces participants de formuler des observations sur les modifications proposées au régime. Si 30 % ou plus des participants actifs s’opposent aux modifications proposées, celles-ci ne peuvent pas être appliquées, à moins qu’une décision de la CRT ne les autorise.

MODIFICATIONS OBLIGATOIRES
Les régimes de retraite du secteur municipal qui ne sont pas soumis au processus de restructuration résumé ci-dessus sont tout de même visés par le projet de loi n° 79 qui prévoit que ces régimes doivent être modifiés afin :

  • de prévoir le partage 50/50 des coûts pour le service courant;
  • d’abolir la prestation additionnelle prévue par la Loi RCR.

Des règles sont prévues au projet de loi quant à l’implantation de ces modifications obligatoires. Il appert qu’en milieu syndiqué ces modifications doivent être négociées avec le(s) syndicats(s).

PROVISION POUR ÉCARTS DÉFAVORABLES
En plus de ce qui précède, tout régime de retraite du secteur municipal doit, selon le projet de loi, être modifié afin de prévoir une provision pour écarts défavorables. Cette provision est constituée par le biais d’une réserve ou d’un fonds de stabilisation et est financée par une cotisation d’exercice additionnelle. Des règles particulières sont prévues dans le projet de loi quant à la négociation de cette provision pour écarts défavorables et quant à son établissement. Ainsi, une entrée en vigueur progressive de cette nouvelle obligation est prévue au terme de laquelle la cotisation annuelle à verser à la réserve ou au fond devra correspondre à 20 % de la cotisation d’exercice.

CONCLUSION
Les élections déclenchées en février dernier font en sorte que le projet de loi n° 79 est mort au feuilleton et devra être redéposé si le nouveau gouvernement élu désire aller de l’avant avec celui-ci.

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