En vigueur depuis le 1er juin 2015 : la Loi sur les mesures de transparence dans le secteur extractif (Canada)

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En accord avec la tendance qui s’observe ailleurs, le Canada a promulgué des règles fédérales qui obligent les entreprises du secteur extractif à produire un rapport annuel si elles ont fait un paiement de 100 000 $ ou plus à un gouvernement au Canada ou à l’étranger. Ces règles s’appliqueront aux paiements faits aux gouvernements autochtones à compter de 2017.

L’objectif de cette loi — pour laquelle de nombreux règlements n’ont pas encore été publiés — est de mettre en oeuvre les engagements internationaux du Canada en matière de lutte contre la corruption par l’imposition de mesures applicables au secteur extractif, notamment pour favoriser la transparence et imposer l’obligation de faire rapport sur des paiements faits par des entités.

Qui doit faire rapport ?

La Loi sur les mesures de transparence dans le secteur extractif1 (la LMTSE ou la Loi) s’applique à :

  1. toute personne morale ou société de personnes, fiducie ou autre organisation non constituée en personne morale qui : soit s’adonne à l’exploitation commerciale de pétrole, de gaz ou de minéraux au Canada ou à l’étranger; soit contrôle une personne morale ou une société de personnes, fiducie ou autre organisation non constituée en personne morale qui s’adonne à l’exploitation commerciale de pétrole, de gaz ou de minéraux au Canada ou à l’étranger; et
  2. dont les actions ou titres de participation sont inscrits à une bourse de valeurs canadienne; ou ayant un établissement au Canada, y exerçant des activités ou y possédant des actifs et qui, selon ses états financiers consolidés, remplit au moins deux des conditions ci-après pour au moins un de ses deux derniers exercices : (i) possède des actifs d’une valeur d’au moins 20 000 000 $, (ii) a généré des revenus d’au moins 40 000 000 $, (iii) emploie en moyenne au moins 250 employés; ou toute autre entité prévue par règlement; et
  3. a fait des paiements de 100 000 $ ou plus à des gouvernements au Canada ou à l’étranger au cours d’un exercice.


Quand le rapport doit-il être déposé ?

Dans les cent cinquante (150) jours suivant la fin de chacun de ses exercices, l’entité est tenue de déposer son rapport au ministre fédéral responsable (qui reste à être désigné). Conformément aux dispositions transitoires de la Loi, l’entité est tenue de déposer un rapport couvrant son premier exercice complet qui suit l’entrée en vigueur de la loi (le 1er juin 2015). Le rapport doit être rendu public de la manière précisée par règlement et demeurer accessible au public pendant au moins cinq ans.


Que doit contenir le rapport ?

L’entité doit déclarer les paiements faits à des bénéficiaires.

Les paiements peuvent avoir été faits en espèces ou en nature (la valeur d’un paiement en nature correspond aux coûts engendrés par l’entité pour les biens ou services qu’elle a offerts ou, s’il est impossible de les établir, à leur juste valeur marchande) et le seuil de l’exigence de déclaration (un total de 100 000 $ ou le montant prescrit par règlement) est établi par catégorie de paiement :

  • taxes, à l’exclusion des taxes à la consommation et des impôts sur le revenu des particuliers;
  • redevances;
  • frais, notamment frais de location, droits d’accès et frais de nature réglementaire et frais — ou autre contrepartie — relatifs à une licence, à un permis ou à une concession;
  • droits découlant de la production;
  • primes, notamment primes de signature et primes liées à la découverte de gisements ou à la production;
  • dividendes, à l’exclusion des dividendes payés à titre d’actionnaire ordinaire d’une entité;
  • paiements pour l’amélioration d’infrastructures;
  • toute autre catégorie de paiement prévue par règlement.


Le paiement doit se rapporter à des activités d’exploitation commerciale de pétrole, de gaz ou de minéraux. Par exploitation commerciale de pétrole, de gaz ou de minéraux s’entend : a) l’exploration de pétrole, de gaz ou de minéraux ou leur extraction (les termes « exploration » et « extraction » seront définis par règlement); b) l’acquisition ou la détention d’un permis, d’une licence, d’un bail ou d’une autre autorisation permettant de mener l’une ou l’autre des activités visées à l’alinéa a); ou c) toute autre activité relative au pétrole, au gaz ou à des minéraux prévue par règlement. « Pétrole » comprend le pétrole brut, le bitume et les schistes pétrolifères; « gaz » comprend le gaz naturel ainsi que toute substance produite avec ce gaz, à l’exclusion du pétrole; « minéraux » comprend les minerais métalliques ou non métalliques naturels, notamment le charbon, le sel, les produits de carrières et de puits ainsi que tous les métaux et minéraux rares et précieux.

Par « bénéficiaire » s’entend :

  1. tout gouvernement au Canada ou à l’étranger;
  2. tout organisme établi par au moins deux gouvernements;
  3. tout conseil, toute commission, toute fiducie ou société ou tout autre organisme qui exerce, pour un gouvernement visé à l’alinéa a) ou un organisme visé à l’alinéa b);
  4. tout autre bénéficiaire désigné par règlement.


À compter de juin 2017, la Loi s’appliquera également aux bénéficiaires suivants :

  1. un gouvernement autochtone au Canada;
  2. un organisme établi par au moins deux gouvernements autochtones au Canada;
  3. tout conseil, toute commission, toute fiducie ou société ou tout autre organisme qui exerce, pour un gouvernement visé à l’alinéa a) ou un organisme visé à l’alinéa b), des attributions publiques ou qui est établi pour le faire.


Dispositions déterminatives

La LMTSE a une portée étendue et prévoit de nombreuses dispositions déterminatives. Par exemple, soulignons que, aux fins de la Loi :

  • le paiement fait à l’employé d’un bénéficiaire ou au titulaire d’une charge publique au sein d’un bénéficiaire est réputé avoir été fait à ce bénéficiaire;
  • le paiement dû à un bénéficiaire et reçu, pour son compte, par tout organisme qui n’est pas un bénéficiaire est réputé avoir été fait à ce bénéficiaire;
  • le paiement fait par une entité qui est contrôlée par une autre entité est réputé avoir été fait par cette dernière;
  • le paiement fait pour le compte d’une entité est réputé avoir été fait par celle-ci.


Sous réserve des règlements, une entité est contrôlée par une autre si elle est contrôlée par celle-ci directement ou indirectement, de quelque manière que ce soit. L’entité qui en contrôle une autre est réputée contrôler toute entité qui est contrôlée, ou réputée l’être, par cette autre entité.

Détails sur la production des rapports

Le ministre responsable peut donner des directives relatives à la présentation des renseignements devant être inclus dans les rapports. Les rapports doivent comprendre une attestation, faite par un dirigeant ou administrateur de l’entité ou par un vérificateur ou comptable indépendant, portant que les renseignements fournis dans le rapport sont véridiques, exacts et complets. Le ministre responsable peut accepter des rapports substituts d’autres autorités compétentes après examen des exigences d’équivalence. Des filiales peuvent être dispensées de l’exigence de fournir un rapport si leur société mère dépose un rapport consolidé. Les données contenues dans les rapports doivent être conservées pendant une période de sept ans ou la période prévue par règlement.

Exécution

Le ministre responsable dispose de pouvoirs de perquisition et de saisie ainsi que de pouvoirs d’ordonnance. Quiconque omet de déposer un rapport, omet de se conformer à une ordonnance, structure ses paiements dans l’intention de se soustraire à l’obligation de faire rapport ou fait une déclaration fausse ou trompeuse commet une infraction passible, sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, d’une amende maximale de 250 000 $ par jour pour chacun des jours au cours lesquels se continue l’infraction. Tout dirigeant, administrateur ou mandataire d’une personne ou d’une entité qui commet une infraction ayant ordonné ou autorisé la perpétration de l’infraction, ou y ayant consenti ou participé, est considéré comme un coauteur de l’infraction et est passible, sur déclaration de culpabilité, de la peine prévue, que la personne ou l’entité ait été ou non poursuivie ou déclarée coupable. Nul ne peut être déclaré coupable de l’infraction s’il prouve qu’il a exercé la diligence voulue pour l’empêcher.

En avant !

La LTMSE est maintenant une réalité. Il est important que les entités assujetties à la Loi commencent à envisager la possibilité de demander une substitution de rapport (dans le cas d’autres autorités compétentes), de demander une exemption les dispensant de l’obligation de produire des rapports (dans le cas de filiales) ou de se prévaloir des options en matière de collecte, de stockage et de récupération de données (en attente des directives du gouvernement relatives à la forme que devra prendre le rapport). Restez à l’affût de renseignements importants à venir une fois que le gouvernement fédéral aura présenté ses règlements, par exemple, eu égard des circonstances dans lesquelles certaines dispositions de la Loi ne s’appliquent pas à des entités, paiements ou bénéficiaires ou de l’établissement du taux de change à utiliser pour convertir les paiements en dollars canadiens.

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1 L.C. 2014, ch. 39, art. 376.

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