Le plan d’action du gouvernement du Québec afin de rendre les régimes de retraite équitables et durables

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En décembre dernier, la ministre de l’Emploi et de la Solidarité sociale dévoilait le plan d’action du gouvernement du Québec dans le but de « corriger et redresser la situation des régimes de retraite ». Dans ce document, le gouvernement annonçait principalement : 

  • que la proposition de rente de longévité présentée dans le rapport du comité d’experts publié en avril 2013 (plus communément appelé le rapport D’Amours) sera discutée lors des rencontres fédérales, provinciales et territoriales sur la couverture des régimes publics de retraite;
  • qu’il étudiera la bonification du Régime de rentes du Québec;
  • que des solutions différentes en matière de financement devront être élaborées pour les régimes de retraite du secteur privé et pour ceux du secteur public (soit les régimes de retraite des municipalités et des universités);
  • que dans le cas des régimes de retraite du secteur public, il rendra obligatoire le partage des coûts à 50/50 entre les employeurs et les participants actifs pour les services futurs;
  • qu’un processus de restructuration des régimes de retraite à prestations déterminées (ci-après désignés les « régimes PD ») sera développé, lequel sera fondé, en premier lieu, sur le principe de la négociation entre l’employeur et les participants au régime.

LES FORUMS DE TRAVAIL
Le plan d’action publié par le gouvernement prévoit également la création de trois forums de travail, soit un pour le secteur privé, un pour les municipalités et un pour le milieu universitaire. Dans les 24 heures qui ont suivi la publication du plan d’action, les maires de Montréal et de Québec, ainsi que l’Union des municipalités du Québec ont indiqué qu’ils ne voulaient pas d’un tel forum de travail et ont réclamé un processus accéléré dans le cas des régimes PD des municipalités. Malgré ces demandes, les trois forums de travail ont été maintenus et leurs travaux ont déjà débuté. En effet, les travaux du forum pour le secteur municipal ont débuté le 21 janvier, ceux du forum pour le milieu universitaire, le 22 janvier et ceux du forum pour le secteur privé le 24 janvier.

Le mandat de ces forums consiste principalement à :

  • déterminer les mesures les plus efficientes devant être utilisées en ce qui concerne le financement des régimes PD;
  • proposer les paramètres qui serviront à encadrer la négociation entre les employeurs et les participants dans le cadre du processus de restructuration;
  • établir les critères qui guideront les décisions de la Commission des relations du travail (la « CRT ») lorsque cette dernière devra trancher un différend lors de la dernière étape du processus de restructuration.

Chaque forum regroupe des représentants patronaux et syndicaux du secteur concerné. Il est également indiqué dans le plan d’action que des représentants des jeunes travailleurs et des retraités seront associés aux discussions.

Les travaux de ces forums devraient aider le gouvernement à rédiger les projets de loi qu’il entend déposer afin de mettre en oeuvre sa réforme. Le gouvernement prévoit déposer un premier projet de loi en février 2014 qui visera à mettre en place, pour les régimes des municipalités, le processus de restructuration expliqué ci-dessous. Un projet de loi visant le même objectif devrait être déposé au printemps 2014 pour les régimes du milieu universitaire et pour les régimes du secteur privé. Enfin, selon le plan d’action, un autre projet de loi sera déposé à l’automne 2014 concernant les nouvelles règles de financement des régimes PD et inclura certaines des mesures proposées par le rapport D’Amours dont l’implantation a été recommandée par la Commission des finances publiques en septembre 2013. Selon ce qui a été annoncé par le gouvernement, chacun de ces projets de loi serait soumis à une consultation publique.

LE PROCESSUS DE RESTRUCTURATION DES RÉGIMES PD
Le processus de restructuration envisagé par le gouvernement s’échelonnerait sur une période totale de deux ans. À la lumière de l’information présentée dans le plan d’action, il semble que ce processus s’appliquerait seulement aux régimes de retraite qui sont négociés entre l’employeur et le syndicat, bien que le plan d’action ne soit pas tout à fait limpide à cet égard.

Une fois que les paramètres de ce processus auront été déterminés, une période de négociation de six mois serait accordée aux parties visées, soit du 1er juillet au 31 décembre 2014. À défaut d’une entente entre les parties à l’expiration de cette période, un conciliateur serait nommé, sous la responsabilité du ministère du Travail, pour une période de six mois (soit du 1er janvier au 30 juin 2015). Si les parties ne parvenaient toujours pas à s’entendre à la fin de cette période, la CRT aurait pour tâche de solutionner le différend. Dans le cadre de ce nouveau rôle, elle ferait appel à la Régie des rentes du Québec afin de valider les propositions retenues. Une dernière période de six mois (soit du 1er juillet au 31 décembre 2015) serait accordée si cette dernière phase du processus de restructuration s’avérait nécessaire.

Certains s’opposent farouchement à ce que la CRT ait pour rôle de trancher, en bout de ligne, les différends en cas d’échec des négociations. Jusqu’à maintenant, la ministre de l’Emploi et de la Solidarité sociale maintient que la CRT demeure le choix du gouvernement.

LE FINANCEMENT DES RÉGIMES PD
Selon le plan d’action du gouvernement, dans le cas des régimes PD du secteur privé, la méthode de financement proposée par le rapport D’Amours, soit la méthode « de la capitalisation améliorée », sera retenue, mais ajustée. Le plan d’action n’aborde aucunement la question des ajustements qui devront être apportés à cette nouvelle méthode de financement, lesquels seront vraisemblablement discutés lors des forums de travail.

Quant aux régimes PD du secteur public, le gouvernement entend maintenir les règles actuelles de capitalisation, tout en consolidant celles-ci.

Ainsi, contrairement aux recommandations du rapport D’Amours qui proposaient que les régimes des secteurs privé et public soient dorénavant tous assujettis à une seule méthode de financement (à savoir, celle de la « capitalisation améliorée »), le gouvernement semble vouloir conserver des règles de financement distinctes pour les régimes de ces deux secteurs.

CONCLUSION
Même si plusieurs éléments du plan d’action du gouvernement restent à préciser ou carrément à élaborer, les positions annoncées par ce dernier suscitent un fort intérêt de la part de différents acteurs et intervenants du milieu des régimes de retraite. Rappelons que dans son rapport de septembre 2013, la Commission des finances publiques recommandait que plusieurs mesures proposées dans le rapport D’Amours fassent l’objet d’analyses ou d’études plus approfondies. Peu croyait que le gouvernement réagirait si rapidement et de telle façon.

Le processus de restructuration envisagé devrait, en principe, permettre de réviser ou de suspendre certains droits acquis de façon à diminuer les coûts d’un régime de retraite. La ministre de l’Emploi et de la Solidarité sociale n’exclut pas la possibilité de légiférer afin que les retraités puissent eux aussi, dans une certaine mesure, être visés par le processus de restructuration (et donc de remettre en question certains de leurs acquis) :

« Si c’est le moyen que les partenaires trouvent pour régler leurs problèmes, on a le devoir dans cette période exceptionnelle, parce que ça va durer deux ans, d’ouvrir tous les moyens »

Nous continuerons évidemment à suivre avec attention le déroulement des différentes étapes du plan d’action et vous en tiendrons informés.

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