Nouveautés - Publicité, programme de fidélisation et crédit à la consommation

Cette publication a été coécrite par Luc Thibaudeau, ex-associé de Lavery maintenant juge à la Chambre civile de la Cour du Québec, district de Longueuil.

Le 18 juillet 2017, à la suite de l’adoption, en novembre 2017, de la Loi visant principalement à moderniser des règles relatives au crédit à la consommation et à encadrer les contrats de service de règlement de dettes, les contrats de crédit à coût élevé et les programmes de fidélisation1 (la « Loi 24 »), des dispositions législatives et règlementaires importantes touchant les droits et obligations des commerçants et des consommateurs québécois ont été sanctionnées et publiées dans la Gazette officielle du Québec. 

En effet, le Règlement d’application de la Loi sur la protection du consommateur2, le Règlement d’application de la Loi sur le recouvrement de certaines créances3 et le Règlement sur les agents de voyages4 ont fait l’objet de changements et ajouts substantiels. Du même coup, ont été édictées les dates d’entrée en vigueur progressive des dispositions de la Loi 24. Les modifications à la Loi sur la protection du consommateur5, à son règlement d’application et les nouvelles dispositions entreront en vigueur en quatre étapes au cours de la prochaine année. 

Aperçu des modifications affectant substantiellement les obligations des commerçants

Pratiques de commerce et publicité

Les dispositions suivantes sont entrées en vigueur le 1er août 2018 :

-      En vertu du nouvel article 231.1 LPC, l’illustration d’un bien ou service dans un message publicitaire devra être fidèle au bien ou service véritablement offert lorsque le message divulguera aussi son prix ou sa valeur.

-      Le nouvel article 244.1 LPC interdira aux commerçants de faire, à l’occasion d’un message publicitaire, une représentation fausse ou trompeuse selon laquelle le crédit peut améliorer la situation financière d’un consommateur.

-      Le nouvel article 251.1 LPC interdira de retenir une somme d’argent sur une carte de crédit à moins de divulguer, avant l’opération visée, le motif et la durée de cette retenue.

-      Le nouvel article 251.2 LPC interdira aux commerçants de transmettre à un agent de renseignements personnels des renseignements indiquant qu’un consommateur s’est prévalu d’un droit à la résolution ou la résiliation d’un contrat prévu par la LPC ou des informations défavorables à ce consommateur concernant des sommes qui ne sont plus exigibles en raison de l’exercice de ce droit.

En vertu du nouvel article 223.1 LPC, les commerçants devront présenter les informations contenues dans les messages publicitaires de façon claire, lisible et compréhensible. Cette disposition entrera en vigueur le 1er février 2019.

Clarification quant aux programmes de fidélisation   

En raison de l’entrée en vigueur des nouveaux articles 79.6.1 et suivants du Règlement, les nombreux commerçants offrant des programmes de fidélisation permettant d’obtenir des biens ou des services dont la valeur dépasse 50$ pourraient avoir à modifier leurs pratiques.  Ces dispositions entreront en vigueur le 1er août 2019 :

-      Le nouvel article 79.6.4 prévoit que les conditions permettant de recevoir des unités d’échange, les modalités applicables à l’échange, les modalités applicables à la péremption ainsi que le facteur de conversion utilisé pour convertir les unités d’échange sont des renseignements que les commerçants doivent obligatoirement fournir aux consommateurs dans le cadre des programmes de fidélisation.

-      La disposition du nouvel article 79.6.7 restreindra pour sa part la possibilité pour les commerçants d’augmenter le nombre d’unités à échanger pour obtenir un bien ou un service, à moins que cette augmentation ne soit justifiée par une augmentation significative de la valeur marchande de ce bien ou service.

Depuis le 1er août 2018, le nouvel article 187.8 LPC exige que les unités d’échange obtenues par un consommateur demeurent valides et ne puissent expirer à une date déterminée ou après une période établie. L’effet de cette nouvelle disposition sera assoupli un an plus tard par le nouvel article 79.6.4 du Règlement.

Qualification du crédit à coût élevé

Les dispositions concernant le crédit à coût élevé entreront en vigueur le 1er août 2019 :

-      Selon le nouvel article 61.0.3 du Règlement, les contrats de crédit seront considérés à coût élevé lorsque leur taux de crédit sera 22 points de pourcentage plus élevé que le taux d’escompte de la Banque du Canada.

-      Les ajouts au nouvel article 93 du Règlement imposeront par ailleurs aux commerçants  offrant du crédit à coût élevé d’être titulaires d’un permis particulier. Le nouvel article 18 du Règlement prévoira toutefois que les banques, les coopératives de services financiers, les sociétés de fiducie et de prêt, les prêteurs hypothécaires et les sociétés d’assurance ne seront pas assujetties à l’obtention de ce permis.

-      En vertu du nouvel article 73 de la LPC, un contrat de crédit à coût élevé pourra dorénavant être résolu dans les 10 jours qui suivent celui où chacune des parties est en possession d’un double du contrat.

Resserrement des règles relatives à l’évaluation de la capacité de rembourser des consommateurs 

Les dispositions suivantes seront applicables à compter du 1er août 2019 :  

-      Les nouveaux articles 103.2 et suivants LPC, ainsi que les nouveaux articles 61.0.1 et suivants du Règlement, qui prévoient une obligation d’évaluer la capacité de rembourser du consommateur avant de lui accorder du crédit et que cette capacité à rembourser du consommateur s’évaluera dorénavant en fonction des critères énoncés, notamment les revenus bruts du consommateur, le total des dépenses mensuelles récurrentes liées à l’habitation, le total des débours exigés en vertu d’un contrat de crédit ou d’un contrat de louage à long terme de biens, les informations contenues au rapport de crédit au moment de l’évaluation de la capacité à rembourser et, le cas échéant, l’historique de crédit auprès du commerçant.

-      Le nouvel article 103.3 LPC, qui énonce que l’omission d’effectuer l’évaluation prévue à l’article 103.2 pourra faire perdre au commerçant le doit de réclamer des frais de crédit. Le cas échéant, le commerçant pourrait avoir à rembourser les frais de crédit déjà payés par le consommateur.

-      Le nouvel article 61.0.5 du Règlement prévoit que les prêteurs qui concluent des contrats de crédit à coût élevé devront présenter au consommateur un document résumant le résultat de l’évaluation de sa capacité de rembourser ainsi que son ratio d’endettement, les modalités de calcul du ratio d’endettement, les éléments ayant servi au calcul du ratio d’endettement et, si le ratio d’endettement dépasse 45%, une mention obligatoire d’avertissement doit être inscrite dans le document.

-      Pour sa part, le nouvel article 103.5 LPC énonce que tout consommateur ayant conclu un contrat de crédit à coût élevé alors que son ratio d’endettement dépasse 45% est présumé avoir contracté une obligation excessive, abusive ou exorbitante.

-      Le nouvel article 103.1 LPC : cette disposition prévoit que les moyens de défense pouvant être soulevés par un consommateur relativement au bien financé seront opposables au prêteur; au surplus, en certaines circonstances, le consommateur pourra faire valoir les droits qu’il a contre le commerçant à l’encontre du prêteur.

Renseignements visant le crédit à la consommation

Les dispositions suivantes entreront en vigueur le 1er août 2019 :

-      Pour les contrats de crédit variable, en vertu de la nouvelle formulation de l’article 126 LPC, les commerçants devront fournir des informations précises aux consommateurs dans chacun des états de compte, notamment les droits et les obligations du consommateur relativement aux erreurs de facturation.

-      Pour les relevés d’utilisation d’une carte de crédit, cet article exige l’inclusion d’une estimation du nombre de mois et d’années requis pour acquitter la totalité du solde du compte.

-      Le nouvel article 126.1 LPC prévoit que le paiement minimal mensuel d’une carte de crédit ne pourra être inférieur à 5% du solde du compte. Tous les nouveaux contrats conclus après le 1er août 2019 sont assujettis à cette disposition. Pour les contrats déjà en cours, une période de transition de six ans est à prévoir.  Ainsi, le paiement minimum augmentera progressivement d’un demi-point de pourcentage par année afin de passer de 2 à 5%.

-      Aux fins de l’article 127 de la LPC et de l’article 69.0.1 du Règlement, les émetteurs de cartes de crédit qui transmettent électroniquement les relevés devront les conserver et les rendre accessibles aux titulaires pendant une période de 2 ans.

Conformément au nouvel article 21 du Règlement, les hypothèques de type parapluie seront visées par une double obligation de consentement. L’acte constitutif d’hypothèque devra indiquer les contrats de crédit à la consommation qui sont garantis par une telle hypothèque. Au surplus, une mention explicite indiquant que ce contrat de crédit est garanti par une hypothèque sur la valeur de la propriété du consommateur devra aussi être intégrée au contrat. Les commerçants qui concluent des contrats de crédit devront se conformer aux dispositions sur les hypothèques de type parapluie à compter du 1er août 2019. Notons que cette disposition ne s’appliquera pas aux hypothèques immobilières de premier rang.

Utilisation de modèles de contrat

Dès le 1er août 2019, les contrats de prêt d’argent, les formulaires de demande de carte de crédit, les contrats de crédit variable, les contrats de crédit variable conclus pour l’utilisation d’une carte de crédit, les contrats de vente à tempérament, les contrats de louage à valeur résiduelle garantie et les contrats assortis d’un crédit autre que de vente à tempérament devront désormais contenir certains renseignements précis, notamment un encadré informatif figurant au tout début du contrat, et répondre à plusieurs exigences de forme.

Conclusion

D’autres obligations entreront progressivement en vigueur au cours de la prochaine année.  Cela est notamment vrai en ce qui concerne les agents de voyage qui sont entrées en vigueur le 1er août 2018 et d’autres qui entreront en vigueur le 1er janvier 2019 et pour les dispositions relatives à la délivrance d’un certificat de représentant d’agent de recouvrement et aux mentions exigées pour les contrats conclus par un commerçant de service de règlement de dettes dont l’application débutera le 1er février 2019. Finalement, les commerçants devront se conformer à l’ensemble des autres dispositions de la Loi 24 et de ses règlements d’application à compter du 1er août 2019.

Les commerçants doivent porter une attention particulière aux dispositions qui entreront en vigueur au cours de la prochaine année en matière de droit de la consommation. En effet, la LPC contient des dispositions pénales prévoyant des amendes importantes pouvant varier entre 600$ et 100 000$ pour les contrevenants à la Loi ou à ses règlements d’application. 

Nous vous invitons finalement à noter que tous les contrats visés par la Loi sur la protection du consommateur doivent dorénavant être rédigés sur du papier blanc de bonne qualité. 

Du moins, pendant que le papier existe encore, et la nouvelle loi n’a malheureusement rien prévu à ce sujet! Espérons que le législateur adoptera dans un avenir rapproché des dispositions permettant expressément aux commerçants de conclure des contrats avec des consommateurs en utilisant des tablettes électroniques.

 

  1. LQ 2017, c 24.
  2. RLRQ c P-40.1, r 3 (ci-après : le « Règlement »).
  3. RLRQ c R-2.2, r 1
  4. RLRQ c A-10, r 1
  5. RLRQ c P-40.1 (ci-après : la « LPC »).

 

 
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