Recrutement : pourquoi faut-il préparer vos questions d’entrevue?

Lors d’une entrevue d’embauche, un employeur ne doit pas poser de questions portant sur un motif de discrimination interdit par la Charte des droits et libertés de la personne1(la «  Charte »), tel que la religion, l’état civil ou l’origine ethnique ou nationale d’un candidat.

Le simple fait de poser une telle question est susceptible d’entraîner une violation de la Charte, obligeant dès lors l’employeur à démontrer, pour obtenir le rejet d’une réclamation en dommages, que les renseignements recherchés sont fondés sur les aptitudes ou qualités requises par l’emploi à combler2.

Tirer des leçons des jugements rendus par le Tribunal des droits de la personne

En 2018, le Tribunal des droits de la personne (TDP) a rendu trois décisions dont le contenu établit des principes à considérer par les employeurs qui entreprennent des processus d’embauche.

Le TDP s’est prononcé sur des plaintes déposées à la suite de recrutements lors desquels des questions avaient été posées sur l’accent ou l’origine ethnique du nom du candidat. Ce dernier n’a, par la suite, pas vu sa candidature retenue. Le plaignant a soutenu qu’il avait été victime de discrimination fondée sur son origine ethnique ou nationale.

Le TDP a rappelé que l’article 18.1 de la Charte vise à enrayer la discrimination à l’embauche en interdisant les questions portant sur des caractéristiques personnelles sans lien avec les qualités ou les capacités du candidat.

Les employeurs affirmaient avoir posé la question  reprochée, mais qu’elle s’inscrivait dans un contexte particulier :

  • Afin de savoir si l’origine ethnique du plaignant correspondait à l’un des pays où se trouvaient des partenaires d’affaires de l’entreprise, pour ainsi se justifier selon les exigences de l’emploi.
  • À l’occasion d’une conversation informelle ayant eu lieu avant l’entrevue.
  • Par simple curiosité et pour comprendre la raison pour laquelle le candidat tutoyait les représentants de l’employeur.

Le TDP a rejeté ces explications et souligné que peu importe la raison motivant la question ou encore la manière de la formuler, il demeure que celle-ci, posée  durant l’entrevue d’embauche, visait à connaître une caractéristique personnelle du candidat liée à son origine, ce qui est proscrit par la Charte.

Dans ses décisions, le TDP rappelle également les éléments suivants:

  • Les conversations informelles qui se déroulent avant ou après une entrevue formelle font partie des étapes d’un processus d’embauche et ne peuvent donc pas se soustraire aux protections prévues par la Charte des droits et libertés de la personne.
  • Si une question est posée sur l’origine ethnique d’un candidat, l’employeur doit être en mesure de démontrer que les réponses recherchées concernent les aptitudes et qualités requises par l’emploi.

Démarches que l’employeur doit privilégier

1. Préparer un plan d’entrevue et s’y conformer

Ces décisions démontrent qu’il est très important de bien préparer un processus d’embauche et d’établir au préalable un plan d’entrevue définissant clairement les exigences de l’emploi pour s’assurer de ne poser que des questions ayant une pertinence directe relativement à ces exigences.

2. Éviter les questions posées à l’improviste  

À la lumière des jugements du TDP, les questions formulées « par simple curiosité », à l’improviste ou à caractère plus relationnel ou pour autrement détendre l’atmosphère doivent être exclues et à plus forte raison, lorsque ces questions risquent d’établir un lien direct ou indirect avec l’un des motifs de discrimination interdits par l’article 10 de la Charte.

3. Exiger la même vigilance des consultants externes et dans ses communications écrites  

Cette planification doit en outre comprendre et encadrer le contenu d’échanges courriels, de messages textes ou d’entrevues préalables selon de nouveaux modes de communication ou de présélection, tant par l’employeur que par ses consultants externes alors que le TDP souligne que les balises de la Charte trouvent également application en faisant les adaptations requises en cette ère du numérique.

 

  1. RLRQ, c. C-12, art. 10 et 18.1.
  2. Art. 20 de la Charte.
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