Une demande d’indemnité sur cinq refusée concernant l’assurance maladies graves : quels changements devraient être apportés par les assureurs?

L’Autorité des marchés financiers (AMF) a récemment publié une étude qu’elle a menée auprès des principaux assureurs actifs dans le domaine de l’assurance au Québec s’intitulant Rapport découlant des travaux de surveillance en assurance maladies graves1(ci-après le « Rapport »). L’étude révèle des statistiques surprenantes qui amène l’AMF à indiquer que des changements devraient être apportés dans le domaine des assurances maladies graves : les assureurs devraient tenter de démystifier les produits d’assurance pour les consommateurs afin de les aider à avoir une meilleure compréhension des polices auxquelles ils souscrivent.

L’assurance maladies graves

 

L’assurance maladies graves est une assurance qu’un consommateur peut souscrire pour lui-même ou un proche. Une somme sera versée dans le cadre de cette assurance si l’assuré est atteint d’une maladie grave qui respecte la définition prévue dans son contrat d’assurance. Les maladies qui sont les plus souvent couvertes par ce type d’assurance sont le cancer (à un stade mettant la vie en danger), la crise cardiaque et l’accident vasculaire cérébral.

En général, les principes suivants s’appliquent également à l’assurance maladies graves :

  • Chaque contrat comporte une liste des maladies couvertes;
  • Un contrat d’assurance peut aussi préciser des exclusions relativement aux maladies couvertes;
  • Lorsqu’une maladie grave est couverte par un contrat d’assurance et qu’aucune exclusion ne s’applique, d’autres conditions un peuvent être incluses dans un contrat comme un délai de carence2 ou un délai de survie3. Ces délais varient d’un contrat d’assurance à l’autre.

Constats de l’AMF

 

L’AMF a déterminé qu’une (1) demande d’indemnité sur cinq (5) concernant les assurances maladies graves est refusée par les assureurs.

L’AMF constate dans son Rapport que, de manière générale, l’assurance maladies graves, tant au niveau de la compréhension des produits que de son achat, comporte plusieurs difficultés pour les consommateurs : un manque d’information, de précisions, d’accompagnement et de compréhension du consommateur serait à la base de ces problèmes.

Les maladies couvertes et les caractéristiques de celles-ci diffèrent d’un produit à l’autre et d’un assureur à l’autre. Le consommateur aurait donc de la difficulté à comparer facilement les produits offerts.

De plus, le langage utilisé dans la description des produits et dans la rédaction des polices est parfois complexe.

Par ailleurs, les contrats d’assurance contiennent plusieurs limitations et exclusions (comme les maladies préexistantes) ainsi que des différents délais à respecter qui peuvent être complexes à comprendre.

Recommandations de l’AMF

 

En réponse à ces constats, l’AMF a élaboré cinq (5) recommandations pour les assureurs et elle s’attend à ce que des correctifs soient apportés. Pour l’instant, aucune sanction n’est prévue par l’AMF, mais elle assure qu’elle « prendra les mesures appropriées lorsque requis »4.

  1. Éviter de créer de la confusion ou d’induire une compréhension erronée du produit chez le consommateur par la documentation produite ou les publicités

    Les assureurs doivent porter attention à l’utilisation des statistiques et de slogans dans leur documentation et leur publicité. L’AMF est d’avis que certaines formes de publicité induisent parfois une compréhension erronée du produit chez le consommateur quant à la couverture offerte à cause de statistiques et de slogans qui sont plus larges que la réelle couverture énoncée au contrat.

    Les assureurs doivent se limiter à l’information pertinente à l’égard des caractéristiques réelles du produit offert. L’AMF insiste sur le fait qu’« il faut éviter que le consommateur ait l’impression que la portée de cette couverture est plus englobante qu’en réalité, ou que son besoin d’assurance est plus important que son réel besoin ».

  2. Aider davantage le consommateur pour qu’il comprenne adéquatement le produit

    Un contrat d’assurance peut couvrir différentes maladies et peut contenir des caractéristiques variées. Le vocabulaire utilisé dans ces contrats d’assurance maladies graves est souvent technique et particulier au domaine de la médecine et des assurances.

    Pour éviter la confusion de l’assuré, les assureurs devraient lui transmettre une information pertinente et complète dans un langage accessible.

    L’AMF propose donc que les assureurs rendent accessibles des outils comme des guides, des lexiques, des sommaires, des illustrations et des lignes du temps avec les délais pour aider le consommateur à mieux comprendre les caractéristiques de sa police d’assurance, la portée de la couverture, les limitations et exclusions, les délais prévus, etc.

  3. Accompagner l’assuré et communiquer avec lui après l’achat d’une assurance

    L’AMF indique que l’accompagnement après l’achat d’une assurance maladies graves est important pour favoriser une meilleure compréhension par l’assuré de ses droits et de ses obligations et pour qu’il sache à quel moment il doit les exercer.

    L’AMF propose que les assureurs mettent en place des moyens de communication de l’information après l’achat, comme de l’information sur un site sécurisé, la transmission de relevés périodiques ou des rappels des options pouvant être exercées.

  4. Outiller davantage les réseaux de distribution pour conseiller adéquatement les clients

    L’AMF soutient que les différents intervenants des réseaux de distribution doivent être en mesure de transmettre de l’information claire et pertinente à l’assuré tout au long du cycle de vie du produit.

    Pour y parvenir, les assureurs devraient améliorer leurs programmes de formation et fournir des outils de référence appropriés à leurs réseaux de distribution, qui pourraient inclure les caractéristiques du produit, la clientèle cible de chaque produit, une comparaison avec les autres types de produit pour accompagner le client dans son choix, etc.

  5. Faciliter le processus de demande d’indemnité, de traitement des plaintes et de règlement des différends

    Les assureurs doivent s’assurer de fournir une information adéquate à l’assuré et un traitement équitable des demandes d’indemnités.

    L’AMF propose aux assureurs de rendre les processus de traitement des demandes ainsi que les formulaires de demande d’indemnité facilement accessible sur leur site Web. De plus, les motifs de refus d’une demande d’indemnité devraient être clairement expliqués dans la lettre transmise à l’assuré et cette lettre devrait préciser les prochaines étapes (comme la possibilité de demander une révision ou de porter plainte).

Conclusion

 

Ainsi, les assureurs qui offrent des produits d’assurance maladies graves devraient prendre en compte les recommandations récentes de l’AMF pour mieux informer les consommateurs de leurs droits et de leurs obligations, des produits offerts et de la couverture proposée. En intégrant les suggestions de l’AMF dans leurs activités en lien avec l’assurance maladies graves, les assureurs pourront non seulement diminuer le taux de refus des demandes d’indemnité dans ce secteur, mais également éviter de potentiels litiges.


  1. Autorité des marchés financiers, Rapport découlant des travaux de surveillance en assurance maladies graves (Rapport), Québec, 2021. [Rapport]
  2. Délai afin que la protection pour une maladie grave prenne effet suite à l’entrée en vigueur d’une police d’assurance.
  3. Délai d’indemnisation suivant le diagnostic d’une maladie grave.
  4. Rapport, p.7.
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