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  • Vente en ligne de lentilles ophtalmiques : la Cour d’appel du Québec se prononce

    Dans un arrêt unanime du 16 mai 20161, la Cour d’appel confirme que la délivrance de lentilles ophtalmiques achetées en ligne auprès de fournisseurs qui ne sont pas membres de l’Ordre des optométristes (« Ordre ») ou de l’Ordre des opticiens d’ordonnances ne contrevient pas à la Loi sur l’optométrie2 (« LSO ») ni, par extension nécessaire, à la Loi sur les opticiens d’ordonnances3. Cet arrêt fait suite à un jugement du 3 décembre 20144 de la Cour supérieure qui en était arrivée à la même conclusion. Les faits dans cette affaire se résument comme suit : Coastal Contacts Inc. (« Coastal »), qui fait maintenant affaire sous le nom de Clearly, est une entreprise de Vancouver ne possédant aucun établissement au Québec, qui vend des lentilles ophtalmiques par l’intermédiaire de ses sites Web à des acheteurs de nombreuses provinces canadiennes, comme ceux du Québec. Ses activités sont assujetties et conformes à la législation en vigueur en Colombie-Britannique5. Les acheteurs québécois peuvent transiger directement avec Coastal ou par l’intermédiaire d’opérateurs de sites Web qui lui redirigent les demandes de clients potentiels. Gestion Progex (« Progex »), l’une des parties intimées dans le litige, agissait à ce titre. En l’espèce, l’Ordre soutenait que Coastal et Progex contrevenaient à la LSO en prétendant avoir le droit d’exercer une activité professionnelle réservée aux membres de l’Ordre des optométristes du Québec ou en agissant de manière à donner lieu de croire qu’elles sont autorisées à ce faire. Essentiellement, l’Ordre alléguait que la vente de lentilles ophtalmiques en territoire québécois est un acte réservé aux optométristes en vertu des articles 16 et 25 de la LSO et aux opticiens d’ordonnances en vertu de l’article 8 de la Loi sur les opticiens d’ordonnances. Au soutien de ses prétentions, l’Ordre invoquait deux principaux moyens. D’une part, l’Ordre prétendait que l’article 16 de la LSO devait être lu comme suit : « Constitue l’exercice de l’optométrie tout acte […] qui a pour objet […] la vente de lentilles ophtalmiques ». Suivant cette interprétation et malgré que le contrat soit intervenu, selon les règles ordinaires du droit commun, en Colombie-Britannique, les actes de Coastal tels le placement de la commande, le paiement, la confirmation de la commande et la livraison des lentilles ophtalmiques, ayant été posés au Québec, enfreindraient cet article. Sur ce point, la Cour retiendra que l’article 16 ne permet pas de morceler la vente de lentilles ophtalmiques en une multiplicité d’actes matériels ou immatériels distincts de manière à les inclure dans le champ de pratique exclusif des optométristes. D’autre part, l’Ordre faisait valoir que le terme « vente » employé à l’article 16 de la LSO devait être interprété de manière plus large que lorsqu’il est employé dans le Code civil du Québec. Cet élargissement de la notion de vente serait justifié par la mission principale de l’Ordre d’assurer la protection du public. Ainsi, selon l’Ordre, le terme « vente » doit permettre d’encadrer toute conduite « […] qui consiste à contrôler la distribution au public d’un produit réglementé […] »6. Après avoir analysé les arrêts Eaton7, Celgene Corp8 et Meditrust9, la Cour conclut qu’elle ne peut retenir l’interprétation souhaitée par l’Ordre. La Cour observe que le seul acte imputable à Coastal et posé au Québec est celui de la livraison des lentilles ophtalmiques puisque les autres actes identifiés par l’Ordre relèvent plutôt du libre comportement de l’acheteur à l’égard duquel l’Ordre n’a aucune compétence. La Cour souligne, comme l’avait fait la Cour supérieure dans un litige opposant l’Ordre des optométristes à celui des opticiens d’ordonnances10, que la simple livraison de lentilles ophtalmiques n’est qu’un accessoire de la vente et non pas un élément intrinsèque de celle-ci. En outre, la Cour estime que les lentilles ne sont pas des produits dont la fabrication, la fourniture ou la vente sont tellement réglementées qu’elles justifieraient une interprétation large du monopole de vente revendiqué par l’Ordre au bénéfice de ses membres. Telle extension serait du reste peu compatible avec le principe de l’interprétation restrictive des lois qui créent des monopoles professionnels. Au terme de son analyse, la Cour conclut donc que « la seule délivrance de lentilles ophtalmiques au Québec […] ne peut constituer une contravention à l’article 16 et au premier alinéa de l’article 25 ni l’exercice illégal au Québec de l’optométrie »11. Compte tenu de cette conclusion, la Cour considère qu’il n’est pas nécessaire pour elle de se prononcer sur la portée territoriale de l’article 16 de la LSO. Elle rappelle toutefois le principe juridique reconnu selon lequel on doit présumer, en l’absence de disposition contraire, expresse ou implicite, que l’auteur de la LSO souhaitait qu’elle ne s’applique qu’aux personnes, lieux, actes et faits qui se situent à l’intérieur du territoire du Québec. Coastal était représentée dans ce dossier par des membres du secteur de pratique en droit de la santé de Lavery. Lavery vous tiendra informés de tout fait nouveau relativement à cette affaire. Ordre des optométristes du Québec c. Coastal Contacts Inc., 2016 QCCA 837. Loi sur l’optométrie, RLRQ, c. O-7. Loi sur les opticiens d’ordonnances, RLRQ, c. O-6. Ordre des optométristes du Québec c. Coastal Contacts Inc., 2014 QCCS 5886. Health Professions Act, [RSBC 1996] Chapter 183; Optometrists Regulation, B.C. Reg. 200/2012; Opticians Regulation, B.C. Reg. 118/2010. Extrait du mémoire de l’Ordre, cité au par. [28] de l’arrêt. Association pharmaceutique de la province de Québec c. T. Eaton Co. Ltd., (1931) 50 B.R. 482. Celgene Corp c. Canada (Procureur général), [2011] 1 R.C.S.3. Ordre des pharmaciens du Québec c. Meditrust Pharmacy Services Inc., [1994] R.J.Q. 2833 (C.A.) (autorisation de pourvoi refusée par la Cour suprême [1995] 2 R.C.S. ix. Ordre des opticiens d’ordonnances du Québec c. Ordre des optométristes du Québec, 2013 QCCS 1532. Ordre des optométristes du Québec c. Coastal Contacts Inc., préc., note 1, cité au par. [71] de l’arrêt.

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  • Contrats des organismes publics : soyez branchés dès le 1er juin 2016

    La réglementation en matière de contrats des organismes publics prend un virage numérique. Les modifications, adoptées le 13 avril 2016 qui prendront effet à compter du 1er juin 2016, visent également à préciser les règles relatives à l’évaluation des résultats1. Cinq points essentiels Recours obligatoire aux soumissions électroniques si précisé aux documents d’appel d’offres —> changement de systèmes informatiques à prévoir pour assurer l’intégrité des signatures et soumissions Modifications mineures aux conditions de conformité —> toujours pas de possibilité pour le donneur d’ouvrage de décréter ce qui constitue une irrégularité mineure dans les documents d’appel d’offres Évaluation qualitative des soumissions —> possibilité de demander le détail de l’évaluation en cas de refus Pour les contrats d’approvisionnement, introduction de la notion de « coût total d’acquisition » —> pour déterminer le prix le plus bas ou le prix ajusté, le donneur d’ouvrage peut prendre en considération des coûts additionnels liés à la vie utile des biens et qui ne sont pas compris dans les soumissions. Adoption d’un nouveau règlement sur les contrats en matière de technologie de l’information2 —> ces contrats sont soustraits au cadre ordinaire des contrats d’approvisionnement et de service Transmission des soumissions par voie électronique Les organismes publics peuvent désormais imposer aux soumissionnaires de ne transmettre leurs soumissions que par le système électronique d’appel d’offres approuvé par le gouvernement (SÉAO)3. Ne pas le faire constituera alors un motif de rejet automatique, de même que le fait que la soumission électronique « soit inintelligible, infectée ou autrement illisible une fois son intégrité établie par le système électronique d’appel d’offres »4. En outre, seules pourront être acceptées les soumissions dont l’intégrité a été vérifiée5, c’est-à-dire pour lesquelles il est possible de vérifier que l’information contenue dans le document n’a pas été altérée, que le support est stable et pérenne et que les mesures de sécurité nécessaires à sa préservation existent6. S’il n’est pas possible de vérifier l’intégrité d’une des soumissions à l’ouverture, l’organisme public ne doit pas divulguer les prix, mais plutôt transmettre un avis de défaut au soumissionnaire visé, qui aura alors deux jours ouvrables pour y remédier, à défaut de quoi sa soumission sera rejetée7. Si l’intégrité peut être constatée, l’organisme public devra publier le résultat de l’ouverture dans le SÉAO dans les quatre jours ouvrables8. Bien sûr, l’organisme public peut continuer d’accepter le dépôt de soumissions sur support papier, de manière exclusive ou en sus des soumissions électroniques. Dans ce dernier cas, à compter du 31 mai 2019, advenant qu’une même soumission soit transmise à la fois par voie électronique et sur support papier, elle sera réputée, aux fins de l’analyse de sa conformité, constituer deux soumissions distinctes9. Avant cette date, on pourra considérer que la version sur support papier fait foi. Évaluation des soumissions Conditions de conformité Si, à compter du 1er juin 2016, la «rature non paraphée dans les prix» ne constituera plus un motif de rejet automatique, des motifs tels la soumission conditionnelle ou restrictive, une garantie ne respectant pas les formes et conditions, la tardiveté de la soumission, le nonrespect d’une condition stipulée essentielle, eux, demeurent10. À cet égard, le règlement est plus timide que le projet de règlement publié le 11 novembre 2015, qui prévoyait par exemple la faculté du donneur d’ouvrage de prévoir les conditions pouvant faire l’objet d’une correction par le soumissionnaire en présence d’une irrégularité. Une telle faculté n’a pas été retenue. Résultats de l’évaluation En ce qui concerne les soumissions devant faire l’objet d’une évaluation de qualité, l’organisme public n’était auparavant tenu que de transmettre au soumissionnaire sa note totale. Il doit désormais également, pour le soumissionnaire qui le demande par écrit dans les 30 jours, lui présenter les résultats de l’évaluation de sa soumission pour chacun des critères utilisés pour l’appréciation de la qualité et lui exposer sommairement les motifs justifiant le fait que sa soumission n’ait pas été retenue, le cas échéant. L’organisme public doit répondre au soumissionnaire dans les 30 jours de la réception de sa demande écrite11. Nouveautés propres aux contrats d’approvisionnement Les contrats d’approvisionnement font l’objet de modifications particulières. La plus importante d’entre elles vise les ajustements à apporter au prix de la soumission pour déterminer le prix le plus bas. La notion de « coût d’impact »12 disparaît, au profit de celle de « coût total d’acquisition », qui permet au donneur d’ouvrage de tenir compte des « coûts additionnels liés à l’acquisition des biens ». Ces coûts doivent être présentés aux documents d’appel d’offres. Ils correspondent à des éléments quantifiables et mesures non compris dans le prix soumis, mais que devra assumer l’organisme public pendant la durée de vie utile des biens acquis. On pensera à des coûts d’installation, d’entretien, de soutien et de formation13. Leur valeur doit être communiquée aux soumissionnaires dans les 15 jours de l’adjudication du contrat14. Les modifications au règlement précisent également la mécanique des appels d’offres en deux étapes15 ainsi que celle relative aux essais de conformité: l’organisme public doit d’abord mettre à l’épreuve l’adjudicataire selon les modalités prévues à l’appel d’offres, et ne se tourner vers les autres soumissionnaires qu’en cas d’échec16. Nouveau règlement en matière de contrats technologiques À ces modifications s’ajoute l’adoption d’un nouveau cadre réglementaire propre aux contrats de technologies de l’information qui, à compter du 1er juin 2016, cesseront d’être soumis au régime ordinaire en matière de contrats de service ou d’approvisionnement selon le cas. Disons simplement que si la structure du Règlement sur les contrats des organismes publics en matière de technologies de l’information, D. 295-2016, reprend généralement celle de la réglementation présentement en vigueur, elle innove également, le gouvernement cherchant à refléter certains enjeux propres à « l’acquisition de biens ou la prestation de services en matière de technologies de l’information […] [qui] cherche[nt] à assurer ou à permettre des fonctions de traitement et de communication d’informations par des moyens électroniques, dont notamment leur collecte, leur transmission, leur affichage et leur stockage ». Ce règlement prévoit ainsi des règles précises relatives à la propriété intellectuelle ou à l’infonuagique ainsi que la possibilité d’avoir recours à un nouveau mode d’adjudication, le « dialogue compétitif ». Conclusion Ces modifications réglementaires marquent la volonté du gouvernement de faire du dépôt de soumissions par voie électronique la norme à moyen terme. Elles reflètent également certains enseignements des tribunaux, notamment quant à l’importance d’une documentation d’appel d’offres précise. Finalement, particulièrement en ce qui concerne l’approvisionnement, elles visent à donner plus de latitude au donneur d’ouvrage afin d’assurer la meilleure valeur possible au contribuable. D. 292-2016, 293-2016, 294-2016 et 295-2016 du 13 avril 2016, GOQ.II.2258-2281 (13 avril 2016), modifiant respectivement le Règlement sur les contrats d’approvisionnement des organismes publics, RLRQ c. C-65.1, r. 2 (Rcaop), le Règlement sur les contrats de services des organismes publics, RLRQ c. C-65.1, r. 4 (Rcsop) et le Règlement sur les contrats de travaux de construction des organismes publics, RLRQ c. C-65.1, r. 5 (Rctcop), tous trois adoptés en vertu de la Loi sur les contrats des organismes publics, RLRQ c. C-65.1. Règlement sur les contrats des organismes publics en matière de technologies de l’information, D. 295-2016. Art. 4(5.2.), 9.2 Rctcop, Rcsop, Rcaop; une exception a été prévue pour les contrats d’approvisionnement visés par l’article 383 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux, RLRQ, c. S-4.2 lorsque les documents relatifs au prix soumis sont sous la forme d’une liste de prix dont l’ampleur ou la configuration ne permet pas d’identifier un prix total (art. 46.2 Rcaop). Art. 7 al. 1(5) Rctcop, art. 7 al. 1(4) Rcsop, art. 7 al. 1(4) Rcaop. Art. 13.1 Rctcop, art. 10.1 Rcsop, art. 10.1 Rcaop. Loi concernant le cadre juridique des technologies de l’information, RLRQ c C-1.1, art. 6. Art. 7.0.1 al. 1 Rctcop, Rcsop, Rcaop. Art. 14 al. 4 Rctcop, art. 11 al. 4 Rcsop, art. 11 al. 4 Rcaop. Art. 7 al. 3 Rctcop, Rcsop, Rcaop. Art. 7 al. 1 Rctcop, Rcsop, Rcaop. Art. 32 al. 5 Rctcop, art. 28 al. 4 Rcsop, art. 26.3 al. 3 Rcaop. Art. 13 al. 2 Rcaop (2008-2016). Art. 15.1.1 et 15.1.2. Rcaop. Art. 15.1.2 Rcaop. Art. 26.1-26.3 Rcaop. Art. 7 al. 1(5), 12 al. 2 Rcaop.

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  • Lutte contre le tabagisme et les cigarettes électroniques : nouveaux enjeux pour les entreprises

    C’est dans un contexte d’expansion appréciable du commerce de la cigarette électronique que le Projet de loi no 44 a été adopté1. Porteur d’une réforme législative importante, ce projet de loi encadre notamment l’usage de la cigarette électronique au même titre que celui du tabac. Il modifie également la Loi sur le tabac2, qui porte désormais le nom de Loi concernant la lutte contre le tabagisme3 (ci-après, la « Loi »). Ce projet de loi apporte plusieurs modifications législatives d’intérêt pour l’exploitant d’un lieu visé par la Loi, ce qui inclut les employeurs et les établissements de santé et de services sociaux : l’obligation pour certains employeurs d’adopter une politique concernant la lutte contre le tabagisme d’ici le 26 novembre 2017; l’ajout de dispositions visant à accroître la responsabilité des administrateurs et des dirigeants de personnes morales et de sociétés; l’ajout de nouvelles dispositions ayant pour effet de faciliter la preuve de la poursuite en matière pénale; la hausse du montant des amendes prévues en cas d’infraction à la Loi; l’application de la Loi à la cigarette électronique; l’ajout de nouveaux endroits où il sera interdit de fumer à compter du 26 mai 2016. Voici quelques détails concernant ces modifications. L’OBLIGATION D’ADOPTER UNE POLITIQUE CONCERNANT LA LUTTE CONTRE LE TABAGISME À compter du 26 novembre 2017, tout établissement de santé et de services sociaux, établissement d’enseignement au niveau collégial ou universitaire devra adopter une politique concernant la lutte contre le tabagisme visant à établir un environnement sans fumée et transmettre copie de cette politique au ministre. Cette politique devra tenir compte des orientations qui leur seront communiquées par le ministre de la Santé et des Services sociaux. De plus, tous les deux ans, le directeur général de l’établissement devra faire rapport au conseil d’administration de l’application de cette politique, et l’établissement devra transmettre ce rapport au ministre dans les 60 jours de son dépôt au conseil d’administration4. LA RESPONSABILITÉ ACCRUE DES ADMINISTRATEURS ET DIRIGEANTS DE PERSONNES MORALES ET DE SOCIÉTÉS Depuis le 26 novembre 2015, la Loi contient de nouvelles dispositions qui ont pour effet de créer des présomptions de responsabilité des employeurs et des administrateurs ou dirigeants de personnes morales, de sociétés de personnes ou d’associations non personnalisées5. Essentiellement, ces dispositions prévoient que : dans une poursuite pénale relative à une infraction à la Loi ou à ses règlements, la preuve que cette infraction a été commise par un représentant, un mandataire ou un employé d’une personne morale ou société suffit à établir que l’infraction a été commise par celle-ci; lorsqu’une personne morale, un représentant, mandataire ou employé de celle-ci ou d’une société de personnes ou d’une association non personnalisée commet une infraction à la Loi ou à ses règlements, l’administrateur ou le dirigeant de la personne morale, société ou association est présumé avoir commis lui-même cette infraction. La personne qui souhaite repousser ces présomptions doit démontrer qu’elle a fait preuve de diligence raisonnable en prenant toutes les précautions nécessaires pour prévenir la perpétration de l’infraction reprochée. LES NOUVELLES DISPOSITIONS FACILITANT LA PREUVE DE LA POURSUITE EN CAS D’INFRACTION À titre d’exemple, l’article 11 de la Loi prévoit l’interdiction pour l’exploitant d’un lieu où il est interdit de fumer, tel qu’un milieu de travail ou une installation maintenue par un établissement de santé et de services sociaux, de tolérer qu’une personne y fume (produits du tabac ou cigarette électronique). La preuve d’une telle tolérance expose l’exploitant à une poursuite pénale et, éventuellement, à une condamnation et au paiement d’une amende. Le 26 novembre 2015, cet article a été modifié pour faciliter la preuve de la « tolérance » de l’exploitant. Désormais, il prévoit qu’en cas de poursuite pénale, la preuve qu’une personne a fumé dans un endroit où il est interdit de le faire suffit à établir que l’exploitant du lieu a toléré qu’une personne fume dans cet endroit. L’exploitant du lieu qui souhaite repousser cette présomption doit établir qu’il a fait preuve de diligence raisonnable en prenant toutes les précautions nécessaires pour prévenir la perpétration de cette infraction, notamment en démontrant la présence d’affiches clairement visibles stipulant l’interdiction de fumer et l’absence de cendriers. LA HAUSSE DU MONTANT DES AMENDES PRÉVUES EN CAS D’INFRACTION Le montant de plusieurs amendes prévues en cas d’infraction à la Loi a été révisé à la hausse, tel que le montant de l’amende liée à une contravention à ce même article 11 : MONTANT DES AMENDES   AVANTle 26 novembre 2015 APRÈS le 26 novembre 20156 PREMIÈRE INFRACTION PREMIÈRE INFRACTION entre 400 $ et 4 000 $ entre 500 $ et 12 500 $ RÉCIDIVE RÉCIDIVE entre 1 000 $ et 10 000 $ entre 1 000 $ et 25 000 $ L’APPLICATION DE LA LOI À LA CIGARETTE ÉLECTRONIQUE Depuis le 26 novembre 2015, la cigarette électronique et tous les autres dispositifs de même nature, y compris leurs composantes, sont soumis aux mêmes règles que les produits du tabac. En effet, les interdictions de « fumer » prévues à la Loi visent désormais l’usage des produits du tabac dans la même mesure que celui de la cigarette électronique7. LES NOUVELLES INTERDICTIONS DE FUMER En plus des interdictions déjà existantes sous l’ancienne Loi sur le tabac, à compter du 26 mai 2016, l’interdiction de fumer (tabac ou cigarette électronique) sera notamment étendue aux : véhicules automobiles, lorsque des personnes de moins de 16 ans y sont présentes; terrasses des restaurants et des bars; aires de jeux extérieures pour enfants et qui accueillent le public; terrains sportifs et terrains de jeux, terrains de camps de vacances, les patinoires et les piscines extérieures qui sont fréquentés par des mineurs et qui accueillent le public; terrains des centres de petite enfance et des garderies; terrains des établissements d’enseignement préscolaire, primaire, secondaire, y compris les centres de formation générale aux adultes et les centres de formation professionnelle8. COMMENTAIRES Les modifications apportées par le Projet de loi 44 ont pour effet d’accroître de manière appréciable l’étendue des interdictions de fumer. Elles s’inscrivent dans le cadre de mesures prises par le gouvernement pour renforcer la lutte contre le tabagisme au moyen de diverses mesures concrètes et significatives, telles que l’obligation pour certains employeurs d’adopter une politique en matière de lutte contre le tabagisme et l’ajout de présomptions de responsabilité pénale des administrateurs ou dirigeants de personnes morales ou de sociétés en cas d’infraction à la Loi. Notons que la validité de certaines dispositions de la Loi a récemment été contestée9. La Cour supérieure du Québec n’a toutefois pas encore tranché l’affaire.   Loi visant à renforcer la lutte contre le tabagisme, projet de loi n° 44 (sanctionné le 26 novembre 2015), 1re sess., 41e légis. (ci-après, le « Projet de loi 44 »). RLRQ, c T-0.01. RLRQ, c L-6.2. Projet de loi 44, art. 11 et 76. Articles 57.1 et 57.1.1 de la Loi. Article 43.1.1 de la Loi. Article 1.1 de la Loi. Projet de loi 44, art. 5 et 76. Association québécoise des vapoteries et al. c. Procureur général du Québec, Cour supérieure (200-17-023732-167) (requête déposée le 25 février 2016).

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  • Droit de retour au travail : du ressort de l’arbitre ou de la CNESST et du TAT?

    Le 24 novembre dernier, la Cour d’appel du Québec a rendu un jugement attendu dans l’affaire Université McGill c. McGill University Non Academic Certified Association (MUNACA)1 (affaire « McGill »). Par ce jugement, la Cour dissipe l’ambiguïté jurisprudentielle qui existait depuis quelques années au sujet de la compétence de l’arbitre de grief en matière de litiges découlant de l’interprétation et de l’application de dispositions de conventions collectives relatives au retour au travail d’un salarié à la suite d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle au sens de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (« LATMP »)2. Dans cette affaire, la Cour devait se pencher sur les questions suivantes : les parties à une convention collective peuvent-elles prévoir, au bénéfice de salariés, des conditions plus avantageuses que celles qui sont prévues par la LATMP et, le cas échéant, qui a compétence pour entendre et décider des mésententes découlant des telles dispositions conventionnelles ? Enfin, la Cour devait déterminer si la convention collective unissant les parties en cause contient une telle disposition plus avantageuse que la loi. LE CONTEXTE DE L’AFFAIRE McGILL Un salarié a conservé des limitations fonctionnelles permanentes à la suite d’une lésion professionnelle. La Commission de la santé et de la sécurité du travail3 (« CSST ») a déterminé que celles-ci l’empêchaient d’occuper son poste prélésionnel et identifié un emploi convenable ailleurs sur le marché du travail, un tel emploi n’étant pas disponible chez l’employeur. Après avoir temporairement assigné le salarié à des travaux légers, l’employeur a mis fin à l’emploi du salarié près de cinq ans après la détermination par la CSST de l’emploi convenable, au motif qu’un tel emploi n’existe toujours pas au sein de son organisation. La convention collective unissant les parties prévoit par ailleurs que « [l]e salarié qui redevient capable de travailler, mais qui demeure avec une limitation fonctionnelle permanente l’empêchant d’occuper le poste qu’il occupait antérieurement est replacé, sans affichage, à un autre poste que son état de santé lui permet d’occuper, compte tenu des postes disponibles à combler. » Le salarié conteste la décision de l’employeur de mettre fin à son emploi par voie de griefs et réclame qu’un autre poste lui soit offert et ce, malgré les conclusions de la CSST à l’effet que l’emploi convenable déterminé n’existe pas chez l’employeur. Pour sa part, l’employeur soulève une objection à la compétence de l’arbitre, au motif que celui-ci n’a pas « juridiction sur la capacité d’un travailleur victime d’un accident du travail ayant entraîné des limitations fonctionnelles permanentes, à exercer un emploi chez son employeur4. » Les parties ont convenu d’en traiter de manière préliminaire et l’arbitre conclut que la compétence que lui confère l’article 244 de la LATMP pour régler les modalités de retour au travail « n’inclut pas celle de décider [de] la capacité [d’un salarié] d’exercer un emploi à la suite d’une lésion professionnelle, question réservée à la CSST et à la CLP en appel5 ». Par conséquent, il accueille l’objection de l’employeur et décline compétence, sans se prononcer sur le bien-fondé des griefs contestant notamment la fin d’emploi du salarié. Le Syndicat demande la révision judiciaire de cette décision et la Cour supérieure casse la sentence arbitrale et renvoie les griefs devant l’arbitre afin qu’il se prononce sur le mérite de ceux-ci6. L’employeur interjette appel du jugement. La Cour d’appel du Québec confirme la décision de la Cour supérieure et rejette l’appel de l’employeur. LA DÉCISION DE LA COUR D’APPEL À l’instar de la Cour supérieure, la Cour d’appel conclut que l’article 4 de la LATMP permet aux parties à une convention collective d’y prévoir des dispositions plus avantageuses pour les salariés que celles qui sont prévues par cette loi. L’article 244 de la LATMP ne limite pas cette possibilité. Par conséquent, l’arbitre de grief a compétence exclusive sur la question de savoir si une convention contient une clause conférant des avantages supérieurs à ceux prévus à la LATMP et, le cas échéant, quant à l’interprétation et à l’application d’une telle clause7. À titre d’exemple, la Cour précise qu’une convention collective pourrait prévoir des dispositions avantageuses qui auraient pour effet, notamment : d’allonger le délai d’exercice du droit au retour au travail prévu à l’article 240 de la LATMP et ainsi obliger l’employeur à réintégrer le salarié dans l’emploi prélésionnel ou dans l’emploi convenable et ce, au-delà de la période prescrite par la loi8; d’obliger l’employeur à rendre disponible ou à créer un emploi convenable au sein de son entreprise, s’il n’en existe pas ou s’il n’est pas disponible; d’obliger l’employeur à offrir au salarié incapable de reprendre son emploi prélésionnel tout autre emploi correspondant à ses capacités résiduelles, même s’il ne s’agit pas d’un « emploi convenable » au sens de la LATMP9. La Cour rappelle toutefois que, dans le cadre de l’exercice de sa compétence, l’arbitre demeure lié par les déterminations faites par la CSST ou la Commission des lésions professionnelles (« CLP »), le cas échéant, notamment quant à l’existence d’une lésion professionnelle, à la capacité du salarié à reprendre son emploi prélésionnel, à ses limitations fonctionnelles ou à l’emploi convenable10. Ces déterminations constituent la « toile de fond » sur laquelle s’inscrira la sentence arbitrale. En revanche, si l’arbitre conclut que la convention collective ne comporte aucun avantage additionnel au régime prévu par la LATMP, il ne peut s’arroger compétence pour imposer des obligations additionnelles à l’employeur, et le salarié qui exerce les droits que lui donne cette loi ne peut exiger davantage. Dans une telle éventualité, les parties sont et demeurent liées par les déterminations de la CSST et, le cas échéant, de la CLP11. COMMENTAIRES En somme, selon l’arrêt McGill, l’arbitre de grief a compétence exclusive pour, en premier lieu, déterminer si une convention collective confère à un salarié des droits plus avantageux que ceux qui sont prévus par la LATMP et, le cas échéant, interpréter ces dispositions et en assurer l’application. Dans le cadre de cet exercice, l’arbitre de grief ne peut rejeter, réfuter ni discuter les déterminations faites par la CSST ou la CLP et son intervention doit s’intégrer au cadre tracé par ces organismes en vertu de la LATMP. Cet arrêt dissipe donc l’ambiguïté12 qui pouvait notamment résulter des arrêts Société des établissements de plein air du Québec c. Syndicat de la fonction publique du Québec13 et Syndicat canadien des communications, de l’énergie et du papier, section locale 427 c. Tembec, usine de Matane14, dans lesquels les tribunaux confirment les décisions des arbitres de grief accueillant les objections préliminaires des employeurs portant sur leur compétence au motif qu’ils ne pouvaient remettre en question les décisions rendues par la CSST et la CLP dans le cadre de leur juridiction exclusive. Notons que, dans ces deux affaires, les conventions collectives ne contenaient aucune disposition plus avantageuse que la LATMP au chapitre du droit de retour au travail15. L’avenir nous dira si le jugement de la Cour d’appel dans l’affaire McGill aura un impact sur la négociation de clauses de conventions collectives prévoyant des dispositions plus avantageuses que celles prévues par la LATMP. Cependant, nous croyons que les litiges découlant de la mise en oeuvre du retour au travail d’un salarié suite à un accident du travail ou à une maladie professionnelle devront également être analysés sous l’angle du jugement de la Cour d’appel dans l’affaire Commission de la santé et de la sécurité du travail c. Caron16, selon lequel l’employeur doit, dans le cadre de l’exercice du droit de retour au travail d’un salarié et de la recherche d’un emploi convenable, procéder à un exercice d’accommodement raisonnable conforme à la Charte des droits et libertés de la personne17, jusqu’à la contrainte excessive.   2015 QCCA 1943. En date du 4 janvier 2016, aucune demande d’autorisation de pourvoi à la Cour suprême du Canada n’a été déposée. Nous attirons également votre attention sur les arrêts rendus par la Cour d’appel sur le même sujet dans les affaires Syndicat des cols bleus regroupés de Montréal, section locale 301 c. Beaconsfield (Ville de), 2015 QCCA 1958 et Montréal-Est (Ville de) c. Syndicat des cols bleus regroupés de Montréal, section locale 301, 2015 QCCA 1957. RLRQ c A-3.001. Depuis l’entrée en vigueur, le 1er janvier 2016, de la Loi regroupant la Commission de l’équité salariale, la Commission des normes du travail et la Commission de la santé et de la sécurité du travail et instituant le Tribunal administratif du Québec, L.Q. 2015, c. 15, la CSST a été remplacée par la « Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail » et la CLP est désormais remplacée par le « Tribunal administratif du travail ». Propos rapportés, en première instance, au paragraphe 56 de la sentence arbitrale (D.T.E. 2011T-582), et repris par la Cour d’appel dans l’arrêt McGill, au paragraphe 10. Paragraphe 103 de la sentence arbitrale, repris par la Cour d’appel au paragraphe 15. 2013 QCCS 1175. Arrêt McGill, paragraphe 95. Ce délai prévu à l’article 240 de la LATMP est d’un ou de deux ans, selon le cas. Voir notamment le paragraphe 51. Arrêt McGill, paragraphes 73 et 74. Id., paragraphe 78. Id., paragraphe 20. 2009 QCCA 329. 2012 QCCA 179. Tel que noté par la Cour d’appel dans l’arrêt McGill, paragraphe 60. 2015 QCCA 1048. À cet égard, nous vous référons à notre publication antérieure concernant cet arrêt, que vous pouvez consulter en cliquant ici. RLRQ c C-12.

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  • Trois décisions importantes rendues en 2015 par le Tribunal administratif du Québec concernant des médecins d’établissement

    Au cours de la dernière année, le Tribunal administratif du Québec a rendu plusieurs décisions traitant du contrôle de l’exercice médical des professionnels œuvrant en établissement de santé et de services sociaux. Plusieurs de ces décisions sont d’intérêt pour les établissements, car les principes qu’elles énoncent tendent à confirmer qu’il existe bel et bien une forme de droit de gérance à l’égard des médecins malgré l’absence de lien de subordination traditionnel qui puisse exister entre un établissement et ses médecins. Le refus d’un médecin d’effectuer un stage de perfectionnement constitue un motif suffisant pour qu’un établissement ne renouvelle pas son statut et ses privilèges1 Dans une décision rendue le 18 août 2015, le Tribunal administratif du Québec (TAQ) confirme la décision d’un établissement de ne pas renouveler le statut et les privilèges de l’un de ses médecins après que celui-ci eût refusé d’effectuer un stage de perfectionnement pour acquérir les aptitudes nécessaires à ses nouvelles fonctions. Il s’agissait, en l’espèce, d’un stage de perfectionnement qui lui avait été imposé par son chef de service afin de lui permettre de réintégrer la pratique clinique après avoir vu sa pratique être exclusivement dédiée à des travaux de recherches. Dans sa décision, le TAQ énonce plusieurs éléments essentiels à la bonne compréhension du fonctionnement interne des établissements et du processus de renouvellement du statut et des privilèges d’un médecin, notamment : un établissement, dans le cadre de la gérance d’un service médical, peut exiger d’un médecin qu’il suive un stage de perfectionnement pour acquérir les aptitudes nécessaires à sa pratique; les privilèges professionnels d’un médecin ne sont pas des droits acquis; le processus de renouvellement du statut et des privilèges d’un médecin prévu à l’article 238 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux2 est une question administrative qui se distingue du processus disciplinaire prévu à l’article 249 de cette même loi. Quant à l’étude que doit faire le TAQ en cas de contestation d’un non-renouvellement, celui-ci précise notamment : qu’il doit apprécier si la situation du médecin justifiait le conseil d’administration de ne pas renouveler ses privilèges en tenant compte des exigences propres de l’établissement; qu’il siège de novo et qu’il n’est donc pas limité aux seuls faits présentés à l’origine dans la décision du conseil d’administration de l’établissement. L’enseignement : une obligation pour les médecins exerçant dans un établissement à vocation universitaire3 Dans une décision rendue le 30 avril 2015, le TAQ confirme la décision du conseil d’administration d’un établissement à vocation universitaire refusant le renouvellement du statut et des privilèges d’un médecin qui ne respectait pas les obligations rattachées à la jouissance de ses privilèges. D’emblée, il y a lieu de noter que la compétence clinique du requérant n’était pas en cause dans cette affaire. C’était plutôt son comportement vis-à-vis l’enseignement qui posait problème. Le TAQ note que le médecin avait toujours été bien informé des plaintes qui lui étaient adressées en matière d’enseignement, mais qu’il avait choisi de les ignorer, d’en nier le bien-fondé et de refuser obstinément de donner suite aux recommandations qui lui étaient faites en employant une attitude de défiance et en cherchant visiblement à faire porter le blâme aux autres. Ainsi, malgré les nombreuses chances données à ce médecin, il n’y eut que très peu d’amélioration et d’intérêt de sa part de sorte que l’établissement n’avait eu d’autre choix que celui de ne pas renouveler son statut et ses privilèges. La suspension de privilèges imposée à un médecin doit être purgée malgré son droit d’appel4 Dans une décision rendue le 23 février 2015, le TAQ refuse d’accorder à un médecin une ordonnance visant à suspendre l’exécution d’une résolution adoptée par un centre hospitalier qui lui avait imposé une suspension de son statut et de ses privilèges pour une durée d’un mois. La médecin, une omnipraticienne détenant des privilèges en obstétrique au sein d’un Centre de santé et des services sociaux avait une pratique solo et accouchait elle-même les patientes qu’elle suivait. Le TAQ conclut que ce médecin ne subirait pas de préjudice différent ou plus important que celui inhérent à l’application de la sanction. En outre, elle n’avait pas démontré qu’elle subirait un préjudice sérieux et irréparable puisque, de l’avis du Tribunal, le préjudice financier qu’elle subirait est quantifiable et n’est pas irréparable. Quant au préjudice subi par les patientes, l’établissement pourrait y remédier puisque celles-ci seraient prises en charge par les autres médecins du département selon les mêmes mécanismes prévalant lors des absences de la requérante pour vacances ou congrès.   A. c. Centre Hospitalier A*, 2015 QCTAQ 08321 (requête en révision interne). RLRQ, c. S-4.2. R.A. c. Centre Hospitalier A*, 2015 QCTAQ 041038 (requête en révision, 2015-06-04 (C.S.) 500-17- 088761-153). N.F. c. CSSS A, 2015 QCTAQ 02780.

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  • Attention aux comparaisons : la protection des données peut empêcher l’acceptation d’une présentation de drogue nouvelle

    ELOXATIN®, un produit de Sanofi-Aventis (Sanofi), était vendu au Canada depuis 1999 sous le Programme d’accès spécial (PAS) de Santé Canada. Ce programme autorise dans certains cas d’exception la vente d’un médicament avant son approbation régulière, soit avant l’émission d’un Avis de conformité (AC).  L’ingrédient actif est l’oxaliplatin, un médicament injectable utilisé en chimiothérapie contre le cancer colorectal et parmi les produits anticancéreux les plus vendus à travers le monde. Le 27 octobre 2006, Hospira a déposé une demande de « Présentation de drogue nouvelle » (PDN) au Canada pour l’approbation régulière de l’oxaliplatin soit un mois avant que Sanofi ne dépose sa propre PDN pour ELOXATIN®. L’acceptation de la PDN de Hospira a nécessité plus de temps que les deux années normalement nécessaires pour une telle demande. Entre temps, en 2007, un AC a été accordé à Sanofi  pour ELOXATIN®.  Étant le premier AC à être accordé pour l’oxaliplatin, l’AC de Sanofi a reçu le statut de « Drogue innovante » conférant à Sanofi une période de protection des données expirant le 15 décembre 2015.  Entre la date de l’octroi et l’expiration de la période de protection des données, personne ne peut s’appuyer sur les données d’efficacité et d’innocuité présentées par Sanofi pour l’ELOXATIN®. La protection des données est régie par le Règlement sur les aliments et drogues et plus précisément par l’article C.08.004.1 de ce Règlement.  Habituellement, la protection des données ne peut être utilisée pour empêcher l’octroi d’un AC à un déposant si ce déposant ne réfère pas à une drogue sous cette protection.  Ainsi, dans la majorité des cas où une demande PDN indépendante a été soumise, la protection des données ne peut être invoquée. Dans le cas décrit ci-haut, Hospira a dû correspondre pendant plusieurs années avec Santé Canada avant de se qualifier pour recevoir un AC.  Pour y arriver, Hospira s’est référé, en cours de route, aux données de Sanofi concernant ELOXATIN® incluant sa monographie canadienne.  Malheureusement pour Hospira, le fait de référer à la monographie de ELOXATIN® a eu l’effet d’empêcher le processus d’octroi plutôt que de le faire avancer.   À l’automne 2013, Santé Canada a donc refusé d’octroyer un AC à Hospira parce que cette dernière a comparé son produit avec ELOXATIN®, alors que ELOXATIN® était toujours sous protection de données. Hospira a porté la décision devant la Cour fédérale pour la faire renverser.  Le 6 novembre 2015, la Cour fédérale a maintenu le verdict de Santé Canada (Hospira Healthcare Corporation c. Canada (Health), 2015 FC 1205). La Cour a conclu que Santé Canada était en droit d’appliquer la protection des données même si la comparaison avec ELOXATIN® a été faite suite à un amendement après le dépôt d’une demande PDN indépendante. Cette décision démontre l’importance pour tout déposant d’être prudent lorsque vient le temps de faire des comparaisons directes ou indirectes à une drogue sous protection des données.  Santé Canada n’offre pas de support en ce sens et donc, certains déposants se buteront à une montagne une fois la colline franchie! SVP contactez Serge Shahinian pour plus de détails sur ces enjeux.

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  • Le refus d’un médecin d’effectuer un stage de perfectionnement constitue un motif suffisant pour qu’un établissement ne renouvelle pas son statut et ses privilèges

    Le 18 août 2015, le Tribunal administratif du Québec (TAQ) a confirmé la décision d’un établissement de ne pas renouveler le statut et les privilèges de l’un de ses médecins après que celui-ci ait refusé d’effectuer un stage de perfectionnement pour acquérir les aptitudes nécessaires à ses nouvelles fonctions.1 Ce médecin spécialiste en hématologie avait été recruté comme chercheur il y a plusieurs années. N’ayant pu à l’époque obtenir des privilèges au sein du service d’hématologie, des privilèges lui avaient été octroyés au sein du service de médecine génique. Pendant plusieurs années, la pratique de ce médecin fut exclusivement dédiée à ses travaux de recherche. Bien que le médecin avait des privilèges au sein du service de médecine génique, il ne participait d’aucune façon à la pratique clinique de ce service. Cette situation, bien qu’imparfaite, était cependant tolérée par l’établissement considérant que le médecin devait avoir un statut et des privilèges en règle au sein d’un service de l’établissement afin de pouvoir y poursuivre ses travaux de recherche. Graduellement, le médecin ne réussit pas à renouveler le financement associé à ses projets de recherche, et ce, jusqu’à la cessation complète de ses travaux. Il prit donc la décision de réorienter sa carrière vers la pratique clinique. Considérant qu’il avait des privilèges au sein du service de médecine génique, le chef de ce service lui offrit l’occasion de se joindre à la clinique de médecine génique pour y effectuer le suivi clinique de patientes présentant des risques de cancer du sein ou de l’ovaire. Considérant que le médecin ne disposait pas d’une expérience clinique soutenue et pertinente, le chef de service lui demanda de suivre un stage de perfectionnement relatifs aux examens des seins et aux examens gynécologiques, lesquels sont nécessaires au suivi de cette clientèle. Son intégration à la clinique de médecine génique était conditionnelle à la réussite de ce stage. Le médecin refusa d’effectuer ce stage. Le chef de service fit donc intervenir le chef de département, ainsi que le directeur des services professionnels. Malgré des discussions et négociations qui s’échelonnèrent sur des mois, le médecin persista dans son refus de suivre le stage. Devant cette impasse et le fait que le médecin ne se livrait plus à aucune activité au sein de l’établissement, les démarches internes ont été entreprises par le chef de département afin de ne pas renouveler le statut et les privilèges du médecin. Dans sa décision, le TAQ énonce plusieurs éléments essentiels à la bonne compréhension du fonctionnement interne des établissements et du processus de renouvellement du statut et des privilèges d’un médecin, soit notamment : qu’un établissement, dans le cadre de la gérance d’un service médical, peut exiger d’un médecin qu’il suive un stage de perfectionnement pour acquérir les aptitudes nécessaires à sa pratique; que les privilèges professionnels d’un médecin ne sont pas des droits acquis; que le processus de renouvellement du statut et des privilèges d’un médecin prévu à l’article 238 de la LSSSS2 est une question administrative qui se distingue du processus disciplinaire prévu à l’article 249 de cette même loi. Relativement à l’étude qui doit être faite par le TAQ en cas de contestation d’un non renouvellement, celui-ci ajoute notamment : qu’il doit apprécier si la situation du médecin justifiait le conseil d’administration de ne pas renouveler ses privilèges en tenant compte des exigences propres de l’établissement; qu’il siège de novo et qu’il n’est donc pas limité aux seuls faits présentés à l’origine dans la décision du conseil d’administration de l’établissement. En ce qui concerne l’enquête de novo que devait faire le TAQ, dans cette affaire, le TAQ a autorisé la RAMQ à déposer la facturation des dernières années du médecin, et ce, malgré son opposition. Cette demande, faite par les procureurs de l’établissement, visait à démontrer avec certitude au TAQ que le médecin n’avait pas l’expérience nécessaire au suivi de la clientèle de la clinique de médecine génique. L’analyse par le TAQ de cette nouvelle preuve ne laissa planer aucun doute quant à la nécessité du stage. Le non renouvellement du statut et des privilèges du médecin fut donc confirmé par le TAQ. Cette décision sera finale à moins qu’elle ne soit contestée par le médecin par le biais d’un recours en révision judiciaire, ce qui n’a pas été fait à ce jour. 1 2015 QCTAQ 08321. 2 Loi sur les services de santé et les services sociaux, RLRQ, c. S-4.2.

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  • L’enseignement : une obligation pour les médecins exerçant dans un établissement à vocation universitaire

    Dans une décision rendue le 30 avril 20151, le Tribunal administratif du Québec (le « TAQ ») a confirmé la décision du conseil d’administration d’un établissement à vocation universitaire refusant le renouvellement du statut et des privilèges d’un médecin qui ne respectait pas les obligations rattachées à la jouissance de ces privilèges. D’emblée, il y a lieu de noter que la compétence clinique du requérant n’était pas en cause dans cette affaire. C’était plutôt son comportement vis-à-vis l’enseignement qui posait problème. Au soutien de sa décision, le conseil d’administration de l’établissement mentionnait que le médecin avait manqué à son devoir de supervision, d’encadrement et de disponibilité à l’égard des résidents et externes de façon telle qu’on avait dû lui retirer sa charge d’enseignement et le réorienter vers d’autres fonctions. Depuis plusieurs années, ce médecin ne possédait pas les aptitudes et qualités requises pour exercer sa profession dans un établissement à vocation universitaire et ce, malgré les nombreuses tentatives d’accommodement proposées par l’établissement. Le débat devant le TAQ a principalement porté sur l’interprétation du paragraphe 4 de l’article 238 de la Loi sur les services de santé et services sociaux2, soit les « critères de qualification, de compétence scientifique ou de comportement du médecin ou dentiste, eu égard aux exigences propres à l’établissement et au respect des obligations rattachées à la jouissance des privilèges […] ». Le TAQ a jugé que la décision de nonrenouvellement du statut et des privilèges était bien fondée et devait être maintenue étant donné l’absence d’intérêt évident de ce médecin pour l’enseignement, une composante pourtant essentielle de sa charge de travail. Un tel manque d’intérêt fut donc jugé inacceptable eu égard aux obligations rattachées à la jouissance des privilèges d’un médecin exerçant dans un centre hospitalier universitaire. Afin de faire annuler la décision de l’établissement, le requérant alléguait que le fait que ses privilèges avaient été renouvelés de façon successive, au fil des ans, démontrait qu’il satisfaisait sûrement aux exigences requises en matière d’enseignement. Or, le TAQ ne fut pas de cet avis. En effet, la preuve démontrait que malgré le renouvellement de ses privilèges, ce médecin recevait, depuis 2006, des avis de ses supérieurs lui rappelant de respecter ses obligations en matière d’enseignement. Selon le TAQ, ces renouvellements de privilèges devaient plutôt être vus comme des chances données à ce médecin de remédier aux défauts et lacunes qu’on lui reprochait depuis longtemps. Dans sa décision, le TAQ note que le médecin avait toujours été bien informé des plaintes qui lui étaient adressées en matière d’enseignement, mais que celui-ci avait choisi de les ignorer, d’en nier le bien-fondé et de refuser obstinément de donner suite aux recommandations qui lui étaient faites en employant une attitude de défiance et en cherchant visiblement à faire porter le blâme aux autres. Ainsi, malgré les nombreuses chances données à ce médecin, il n’y eut que très peu d’amélioration et d’intérêt de sa part de sorte que l’établissement n’avait eu d’autre choix que de ne pas renouveler son statut et ses privilèges. À la lumière de la preuve présentée devant le tribunal, notamment du contrat d’affiliation liant le centre hospitalier à l’université, il appert que l’enseignement se trouve au coeur même des activités médicales et représente une exigence distinctive de cet établissement à vocation universitaire. Dans ce contexte, le TAQ a convenu qu’une telle obligation pouvait être rattachée à la jouissance du statut et des privilèges d’un médecin. Paraphrasant ses propos dans l’affaire M.G. c. Centre Hospitalier A3, le TAQ conclut que rétablir le médecin dans ses privilèges ne ferait que le replacer dans une situation où il a été maintes fois démontré qu’il n’était pas en mesure de respecter ses obligations d’enseignant et ce, en raison de ses propres choix4. _________________________________________ 1 R.A. c. Centre Hospitalier A, 2015 QCTA Q 041038. 2 RLRQ, c. S-4.2. 3 2012 QCTA Q 031173. 4 Id., par. 461.

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  • Ordonnances de garde en établissement : aucune exclusion automatique du rapport d’examen psychiatrique en cas de violation des droits et libertés fondamentaux d’une patiente

    Dans un jugement rendu le 30 janvier 2015, la Cour du Québec a déterminé que le dépassement des délais ou la violation des droits et libertés fondamentaux d’une patiente n’entraînait pas l’exclusion automatique d’un rapport d’examen psychiatrique concluant à la nécessité d’une garde en établissement1. La Cour apporte des nuances à une autre décision rendue par ce même tribunal quelques mois plus tôt qui avait rejeté une requête pour ordonnance de garde en établissement pour des motifs similaires2. Dans la première affaire3, il était question d’une patiente qui, ayant manifesté son désir de quitter l’établissement hospitalier, avait subi deux évaluations psychiatriques concluant à sa dangerosité ainsi qu’à la nécessité de la garder en établissement contre sa volonté. Se fiant à l’extrait suivant du rapport médical, la Cour conclut que la patiente avait clairement manifesté son objection à l’entrevue et qu’elle s’était donc soumise à l’« interrogatoire » du médecin contre son gré : « [9] […] Patiente réticente à l’entrevue. Se montre méfiante. Refuse de s’asseoir dans le bureau. Hostile. Nie les informations rapportées au dossier. Ne répond pas aux questions concernant ses symptômes. » [références omises] Après avoir référé aux articles de loi reconnaissant à toute personne le droit à l’inviolabilité et à l’intégrité physique de sa personne et établissant l’obligation d’obtenir le consentement de la personne à l’examen4, la Cour conclut que l’admission et l’utilisation en preuve de ce rapport déconsidéreraient l’administration de la justice. Elle décide, par conséquent, de rejeter la requête pour ordonnance de garde en établissement au motif que cette demande ne repose plus que sur un seul rapport plutôt que sur les deux rapports requis par la loi. Dans l’affaire subséquente5, la procureure de la patiente demandait l’exclusion du second rapport d’examen psychiatrique au motif qu’il avait été effectué après l’expiration du délai de 72 heures permettant à un établissement de mettre une personne sous garde préventive6. Selon ses prétentions, la Cour serait en présence d’une violation à un droit constitutionnel, notamment celui ayant trait à l’intégrité du consentement, et l’admission en preuve de cette expertise risquerait de déconsidérer l’administration de la justice au sens de l’article 2858 du Code civil du Québec7 (« C.c.Q. »). La Cour décide qu’il y a lieu d’effectuer la même démarche que dans l’affaire précédente8. Après avoir entendu le témoignage de la patiente, la Cour conclut que celle-ci a collaboré et consenti à l’examen et, par conséquent, que ses droits fondamentaux n’ont pas été violés. De l’avis de la Cour, en l’absence de telle violation, il n’y a pas lieu de passer à la prochaine étape et de décider si la preuve recueillie en violation des droits milite en faveur de son rejet du dossier en vertu de l’article 2858 C.c.Q. La Cour ajoute par ailleurs que le non-respect des droits et libertés fondamentaux de la personne ne doit pas entraîner automatiquement l’exclusion d’un rapport psychiatrique réalisé tardivement. Un équilibre entre le respect des droits et libertés des patients observé à la lumière des ressources dont disposent les établissements hospitaliers et de la nécessité pour la société de se protéger doit être rencontré. Enfin, sur la question des délais, la Cour conclut simplement qu’elle ne peut cautionner le non-respect des délais, mais dans les circonstances, refuse tout de même de rejeter la requête. _________________________________________ 1 Centre hospitalier de l’Université de Montréal c H.L., 2015 QCCQ 1831 (C.Q.). 2 Centre hospitalier de l’Université de Montréal c. J.F., 2014 QCCQ 12997 (C.Q.). 3 Id. 4 Charte des droits et libertés de la personne, RLRQ c C-12, art. 1 et 4 (la « Charte »); Code civil du Québec, RLRQ c C-1991, art. 10 et 11 (« C.c.Q. »); Loi sur les services de santé et les services sociaux, RLRQ c S-4.2, art. 6 et 9. 5 Préc., note 1. 6 Loi sur la protection des personnes dont l’état mental présente un danger pour elles-mêmes ou pour autrui, RLRQ c P-38.001, art. 7. 7 Préc., note 4. 8 Préc., note 2.

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  • Développements récents concernant la brevetabilité des revendications d’utilisations médicales au Canada

    En décembre dernier, la Cour fédérale du Canada a renversé la décision du Commissaire aux Brevets (« le Commissaire ») qui refusait la demande no 2,385,745 (ci-après la « demande ‘745 ») d’AbbVie Biotechnology Ltd. (« AbbVie ») portant sur l’utilisation d’une posologie fixe du médicament Humira® (Adalimunab) pour le traitement de l’arthrite rhumatoïde. Le Commissaire avait conclu que les revendications portaient sur une méthode de traitement médical non-brevetable en vertu de la Loi canadienne. La décision de la Cour fédérale 1 peut être consultée ici : 2014 FC 1251. Les revendications contestées, ayant pour objet l’utilisation thérapeutique du médicament Humira® selon un dosage fixe(40 mg) et un rythme de prise du médicament fixe (toutes les deux semaines), ont été considérées brevetables par la Cour fédérale. Procédures devant la Commission d’Appel des brevets (CAB) – Décision du Commissaire Durant la procédure devant la CAB, l’appelant AbbVie avait contesté la position de l’Examinateur en argumentant que puisque les revendications définissent un dosage et un rythme de prise du médicament invariables, l’exercice des compétences et du jugement d’un professionnel de la santé était exclu, et que l’objet de ces revendications était de ce fait brevetable. La CAB a rejeté les arguments d’Abbvie, alléguant que la jurisprudence, et plus particulièrement l’arrêt Janssen Inc. c. Mylan Pharmaceuticals ULC 2 (Janssen), a clairement établi que « la simple présence de ces deux caractéristiques [c.-à-d. un dosage et un rythme de prise du médicament fixes] dans une revendication ne suffit pas toujours pour éviter la prohibition de méthode de traitement médical ». La CAB a affirmé que les revendications contestées, en tentant d’imposer des limites sur le « quand et le comment » le médicament est administré aux patients, créeraient une interférence avec la capacité des médecins à exercer leur jugement dans l’administration des versions génériques d’Humira® qui deviendront éventuellement disponibles. Elle a donc conclu que les revendications couvraient une méthode de traitement médical prohibée. Le Commissaire a adopté les recommandations du CAB, et confirma le refus d’octroyer un brevet pour la demande ‘745. Goudreau Gage Dubuc, l’un des plus importants cabinets en propriété intellectuelle au Canada, s'est joint à Lavery Avocats. Les deux cabinets ont intégré leurs opérations afin d’offrir une gamme complète de services juridiques à leurs clients. Le regroupement consolide l’approche multidisciplinaire de Lavery qui poursuit ainsi sa croissance en arrimant à son offre de services l’expertise d’avocats, d’agents de brevets et d’agents de marques de commerce dédiés au droit de la propriété intellectuelle et faisant partie d’une des équipes les plus réputées au pays. Pour en savoir plus, visitez le www.VosAvocatsEnPi.ca. --> La Décision de la Cour fédérale AbbVie a réussi à faire renverser la décision du Commissaire dans son appel devant la Cour fédérale. La juge Kane de la Cour a confirmé que la prohibition des revendications portant sur des méthodes de traitement médical et qui impliquent l’exercice des compétences et du jugement d’un professionnel a été appliquée de façon systématique par les tribunaux en fonction des faits propres à chaque cas. La juge s’est appuyée sur trois décisions en particulier, soit Merck & Co Inc c. Apotex Inc. 3, Merck & Co. Inc. c. Pharmascience Inc. 4, et  Bayer Inc. c. Cobalt Pharmaceuticals Company 5, dans lesquelles des revendications similaires à celles contestées dans le cas présent ont été jugées brevetables puisqu’elles n’impliquaient pas les compétences ou le jugement professionnels, et couvraient donc un produit commercial plutôt qu’une méthode de traitement médical. La Cour fédérale a fait remarquer que le Commissaire avait négligé certains faits spécifiques à l’arrêt Janssen, notamment le fait que les revendications rejetées définissaient une gamme posologique à plusieurs variables ainsi qu’un régime de titration nécessitant qu’un professionnel de la santé effectue un suivi du traitement et apporte des ajustements si nécessaire. La juge Kane a donc statué qu’il était injustifié d’appliquer les principes et conclusions de Janssen aux revendications contestées en l’instance. La Cour fédérale a donc établi une distinction entre les situations où les compétences et le jugement d’un professionnel sont requis pour pratiquer la matière revendiquée, notamment lorsque des ajustements de traitement sont requis ; et les situations où aucune compétence et aucun jugement professionnel n’est impliqué, comme dans les revendications en instance qui définissent une posologie fixe.  Pratiques d’examen révisées À la lumière de cette décision de la Cour fédérale, l’Office de la Propriété Intellectuelle du Canada (OPIC) a émis des directives d’examen révisées 6 et des exemples de revendications d’utilisations médicales brevetables et non-brevetables 7, confirmant que les revendications définissant des caractéristiques qui ne limitent pas l’exercice des compétences professionnelles ou du jugement d’un médecin, comme par exemple un dosage fixe, un régime posologique fixe, une sous-population particulière de patients ou un site d’administration particulier, constituent de la matière brevetable.   Conclusion Cette décision, ainsi que les directives d’examen révisées, jettent un éclairage sur la brevetabilité des revendications définissant des posologies, et confirment que les revendications d’utilisation médicale qui n’engagent pas les compétences ou le jugement d’un professionnel de la santé, notamment celles spécifiant un dosage et/ou un rythme de prise du médicament fixe(s), sont brevetables selon le droit canadien des brevets. Les Demandeurs de brevets souhaitant obtenir une protection au Canada devraient tenir compte de cet important changement à la pratique canadienne.  AbbVie Biotechnology Ltd. c. Canada (Attorney General), 2014 FC 1251.  2010 FC 1123.  2005 FC 755.  2010 FC 510.  2013 FC 1061.  PN 2015-01, émises le 18 mars 2015.  Exemples d’analyses d’interprétation téléologique de revendications portant sur les utilisations médicales aux fins de l’évaluation d’objets prévus par la Loi, http://www.ic.gc.ca/eic/site/cipointernet-internetopic.nsf/fra/wr03919.html, émis le 31 mars 2015.

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  • Délai de traitement des plaintes des usagers d’établissements de santé : la Cour Suprême du Canada refuse d’intervenir

    Le 26 février 2015, la Cour suprême du Canada a rejeté la demande du docteur Gilbert Liu d’en appeler d’une décision de la Cour d’appel en matière de délai de traitement des plaintes des usagers d’établissements de santé. Dans cet arrêt unanime du 4 septembre 2014, la Cour d’appel confirme que le délai de 45 jours prévu par la Loi sur les services de santé et les services sociaux1 (« LSSSS ») pour le traitement des plaintes des usagers par le médecin examinateur et le commissaire local aux plaintes et à la qualité des services n’est pas impératif. Selon la Cour, ce délai servirait plutôt à souligner le désir du législateur que les plaintes soient traitées avec diligence2. Conformément aux pratiques de la Cour suprême, le jugement n’exprime aucun motif. Il met cependant fin à la controverse qui était entretenue sur la portée effective de l’arrêt de la Cour d’appel confirmant le jugement d’avril 2013 de la Cour supérieure3. L’état du droit est désormais clair et l’arrêt de la Cour d’appel fait jurisprudence. Les dossiers en cours, judiciaires ou institutionnels, doivent maintenant être traités conformément aux conclusions de la Cour d’appel et procéder. Il faut rappeler que la position du médecin reposait sur un argument d’interprétation des articles 47 et 49 de la LSSSS suivant lequel un médecin examinateur qui, au terme du délai prévu de 45 jours, n’avait pas encore procédé au traitement d’une plainte et n’avait émis aucune conclusion à son sujet, perdait compétence. Cette plainte devenait alors caduque à moins que le plaignant ne se prévale de son droit d’en saisir le comité de révision. Or, tout comme l’avait fait la Cour supérieure, la Cour d’appel a reconnu que l’objectif principal du régime de traitement des plaintes des usagers est « l’exercice simple et efficace de leurs droits par les usagers ». Interpréter ce délai de 45 jours de la manière suggérée par le médecin en viendrait à pénaliser le plaignant en le privant du droit au traitement de sa plainte. Ce serait faire échec à la finalité recherchée par le législateur. La conclusion de la Cour d’appel peut être étendue à toutes les plaintes des usagers, et non pas uniquement à celles qui concernent des médecins, dentistes ou pharmaciens. Selon la LSSSS, celles-ci doivent être traitées dans un délai imparti. La Cour a fait écho à la réalité observée dans plusieurs milieux où une variété de facteurs peuvent expliquer que le médecin examinateur ou le commissaire aux plaintes ne puisse formuler les conclusions recherchées dans le délai de 45 jours. Ces facteurs peuvent être attribuables au plaignant, à la personne visée par la plainte ou à des événements de toute nature. Cela dit, il faut souligner à nouveau que le délai de 45 jours indiqué dans la loi pour traiter une plainte exprime l’intention du législateur que les plaintes des usagers soient traitées rapidement. Les instances qui seraient dans l’incapacité d’agir dans ce délai seraient bien avisées d’en documenter les raisons de manière à éviter les controverses inutiles. _________________________________________ 1 RLRQ, c. S-4.2. 2 Liu c. Comité de discipline du Centre de santé et de services sociaux Haut-Richelieu-Rouville, 2014 QCCA 1613. 3 Liu c. Comité de discipline du Centre de santé et de services sociaux Haut-Richelieu-Rouville, 2013 QCCS 1856.

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  • Le congédiement pour bris de confidentialité d’une employée de l’urgence d’un centre hospitalier est confirmé

    Dans une décision rendue le 30 décembre dernier1, l’arbitre Nathalie Faucher a conclu que le congédiement imposé par un centre hospitalier en raison du bris de confidentialité commis par l’une de ses employés était bien fondé. L’employée, une agente administrative à l’urgence d’un centre hospitalier, a été congédiée pour avoir manqué à son obligation de confidentialité. L’employeur lui reprochait d’avoir divulgué à une collègue de travail qu’un usager était porteur du VIH. Or, cette collègue était un membre de la famille de l’usager et elle ignorait que ce dernier présentait une telle condition. La preuve de l’employeur a permis d’établir que la plaignante avait obtenu l’information médicale en consultant le registre informatique du centre hospitalier alors qu’elle n’avait pas à s’y référer dans l’exercice de ses fonctions. Il était également démontré que la plaignante avait été mise au courant de ses obligations en matière de confidentialité et qu’elle s’était engagée à les respecter en signant le code d’éthique de l’employeur ainsi qu’un engagement à respecter la confidentialité des renseignements nominatifs et médicaux des usagers. Dans les motifs de sa décision, l’arbitre a tenu compte du texte de l’article 19 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux, L.R.Q., c. S-4.2, lequel énonce que :   « 19. Le dossier d'un usager est confidentiel et nul ne peut y avoir accès, si ce n'est avec le consentement de l'usager ou de la personne pouvant donner un consentement en son nom. (…) »   L’arbitre a également tenu compte du fait que les articles 5 et 9 de la Charte des droits et libertés de la personne consacrent le droit à la confidentialité des informations protégées par le secret professionnel et, donc, qu’un usager est en droit de s’attendre à ce que les informations le concernant soient protégées et ne puissent faire l’objet d’une divulgation à un tiers. De plus, l’arbitre a considéré que la nature des informations qui avaient été communiquées revêtait « un degré extrêmement élevé de sensibilité ». Se fondant sur une décision antérieure2, le tribunal estime que le fait que le bris de confidentialité se soit produit à l’interne ne le rend pas moins grave. Pour l’arbitre, la faute est double en ce que l’employée a non seulement porté atteinte à la confidentialité d’un renseignement, mais elle a en outre obtenu l’information en utilisant un logiciel qui n’était pas pertinent dans le cadre de ses fonctions, d’autant plus que l’employée avait été déjà avertie que la consultation de ce logiciel constituait une faute et qu’elle pourrait être sanctionnée en cas de récidive. Enfin, en fonction de la preuve entendue, l’arbitre estime peu crédible les arguments de « sécurité » mis de l’avant par la plaignante pour tenter de se disculper. Cette dernière prétendait que la divulgation de l’information était nécessaire afin de protéger sa collègue, craignant que celle-ci ne s’infecte dans le transport de l’usager. En conclusion, l’arbitre déclare que le geste comporte le caractère de gravité suffisant pour justifier le congédiement. Malgré les remords exprimés à l’audience par la plaignante, l’arbitre n’est pas convaincue qu’elle comprend la gravité de sa faute ni qu’elle ne récidivera pas. Il n’y a donc pas lieu d’intervenir dans la sanction imposée par l’employeur. _________________________________________ 1 Syndicat des travailleuses et des travailleurs du Centre de santé et de services sociaux de la région de Thetford (FSSS-CSN) et Centre de santé et de services sociaux de la région de Thetford (Karen Tombs), 2014 QCTA 1080. 2 Syndicat des travailleuses et travailleurs de l'Hôpital Charles-LeMoyne (CSN) et Hôpital Charles-LeMoyne, A.A.S. 2010A-104.

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  • Ordonnances de traitement pour les patients jugés inaptes à subir leur procès : les établissements de santé doivent donner leur consentement préalable quant à toutes les modalités de l’ordonnance, y compris quant à la date de l’admission

    Dans un arrêt rendu à 5 contre 41, la Cour suprême du Canada a confirmé, le 3 octobre dernier, qu’une décision ordonnant le traitement d’un accusé inapte à subir son procès requiert le consentement préalable de l’hôpital responsable du traitement, et ce, à l’égard de toutes les modalités de l’ordonnance, incluant la date à laquelle le traitement doit débuter. Dans cette affaire, la juge d’instance de l’Ontario avait déclaré l’accusé inapte à subir son procès et devait, conformément à ses pouvoirs prévus au Code criminel2, rendre une ordonnance de traitement forcé pour une période n’excédant pas 60 jours (article 672.58). En vertu des dispositions applicables, la Cour est alors autorisée à inclure, dans son ordonnance, les modalités du traitement jugées appropriées. Toutefois, avant que la Cour ne rende sa décision, l’hôpital désigné doit donner son consentement (alinéa 672.62 (1)(a)). En l’espèce, la preuve devant la juge d’instance avait établi que l’accusé pourrait être admis à l’hôpital désigné mais seulement dans un délai de 6 jours, aucun lit n’étant disponible entretemps. Préoccupée par le fait que l’accusé était psychotique, la juge n’a pas accepté de le transférer dans un établissement de détention dans l’intervalle et a donc rendu une ordonnance de traitement applicable « sur-le-champ », ordonnant que l’accusé soit traité à un autre hôpital, soit le Centre for Addiction and Mental Health, ou à « l’établissement désigné » (en l’occurrence Oak Ridge). À la suite de cette décision, l’accusé fut conduit par les services aux tribunaux à l’établissement désigné et fut laissé dans un corridor. Les deux hôpitaux ont interjeté appel de la décision devant la Cour d’appel de l’Ontario qui a accueilli l’appel et cassé l’ordonnance de première instance. Le débat devant la Cour suprême du Canada était de déterminer la portée de l’exigence du consentement de l’hôpital : est-ce que le consentement est valide du simple fait que l’hôpital désigné a accepté de traiter le patient ou l’hôpital doit-il également donner son accord quant au délai pour exécuter l’ordonnance ? La Cour suprême décide que les dispositions pertinentes du Code criminel doivent être interprétées comme requérant le consentement de l’hôpital pour toutes les modalités de l’ordonnance de traitement, incluant les conditions que la Cour peut juger nécessaires d’établir. En l’absence d’un tel consentement, la décision ne peut être rendue. Un hôpital peut donc refuser de donner son consentement dans le cas où il n’a pas les ressources humaines ou matérielles pour traiter l’accusé à ce moment précis. Toutefois, la Cour apporte une certaine nuance en indiquant qu’exceptionnellement, dans les très rares cas où il serait démontré que le refus de l’hôpital de traiter immédiatement l’accusé pouvait compromettre les chances qu’il devienne apte à subir son procès dans le délai de 60 jours prévu à la loi, et que cette mesure porte atteinte au droit constitutionnel de l’accusé à la vie, à la liberté ou à sa sécurité, la Cour pourrait déterminer que l’admission immédiate est une mesure de réparation convenable et juste de cette violation. _________________________________________ 1 R. v. Conception, 2014 SCC 60. 2 L.R.C. 1985, ch. C-46.

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