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La Cour fédérale examine les métadonnées en vertu de la Loi sur le droit d’auteur et la Loi sur les marques de commerce
Dans la décision Red Label Vacations Inc. (redtag.ca) c. 411 Travel Buys Limited (411travelbuys.ca) 1, la Cour fédérale a examiné si les métadonnées bénéficient d’une protection en vertu de la Loi sur le droit d’auteur et si l’usage d’une marque de commerce ou d’un nom commercial d’un compétiteur dans les métadonnées constitue une violation de marque de commerce au Canada. Les métadonnées consistent en des phrases ou des mots écrits dans le code source d’un site internet qui sont utilisés par des moteurs de recherche pour classer des sites internet. Les métadonnées ne sont pas perceptibles sur les pages internet pour les navigateurs. Quoique la question de la protection de la propriété intellectuelle dans le contexte des métadonnées soit débattue dans le monde, il s’agit d’une des premières fois que la Cour fédérale se penche sur cette question. Les faits Red Label Vacations Inc. (la demanderesse), exploite un site internet d’informations de voyage : redtag.ca, et est la propriétaire de trois marques de commerce enregistrées : « redtag.ca », « redtag.ca vacations » et « Shop. Compare. Payless!! Guaranteed ». La demanderesse a intenté un recours en Cour fédérale en violation de droit d’auteur, de marques de commerce, de passing off et dépréciation de l’achalandage contre un compétiteur: l’agence de voyages en ligne 411 Travel Buys Limited (la défenderesse). Goudreau Gage Dubuc, l’un des plus importants cabinets en propriété intellectuelle au Canada, s'est joint à Lavery Avocats. Les deux cabinets ont intégré leurs opérations afin d’offrir une gamme complète de services juridiques à leurs clients. Le regroupement consolide l’approche multidisciplinaire de Lavery qui poursuit ainsi sa croissance en arrimant à son offre de services l’expertise d’avocats, d’agents de brevets et d’agents de marques de commerce dédiés au droit de la propriété intellectuelle et faisant partie d’une des équipes les plus réputées au pays. Pour en savoir plus, visitez le www.VosAvocatsEnPi.ca. --> Plusieurs pages internet de la défenderesse comportaient des métadonnées identiques ou similaires aux métadonnées de la demanderesse et incluaient des expressions telles que « red tag vacations » et « shop, compare & payless ». Comme ces expressions ne se trouvaient que dans les métadonnées de la défenderesse, elles n’étaient pas visibles par le consommateur visitant le site de la défenderesse. La Cour a rejeté l’action de la demanderesse. Décision Concernant la violation alléguée à la Loi sur le droit d’auteur, la Cour a jugé que bien que la défenderesse ait copié les métadonnées de la demanderesse, ceci ne constitue pas de la contrefaçon de droit d’auteur puisque les métadonnées de la demanderesse sont composées de mots-clés Google combinés à des expressions génériques et descriptives du domaine du voyage et donc non protégées par le droit d’auteur. La Cour a déterminé que le seuil d’originalité établi par la Cour suprême 2, soit un degré suffisant de talent et de jugement, n’avait pas été satisfait. De plus, la Cour a conclu que si le droit d’auteur existait dans les métadonnées de la demanderesse, il n’y avait pas eu de reproduction importante puisque uniquement 48 des 180,000 quelque pages du site internet de la demanderesse avaient été reproduites par la défenderesse. Le Juge Manson a fait remarquer que la défenderesse a reproduit par inadvertance les métadonnées redtag.ca et que la violation a été faite innocemment. En ce qui concerne la violation alléguée à la Loi sur les marques de commerce, la Cour reconnaît que plusieurs des métadonnées de la défenderesse incluaient les termes dominants des marques de commerce enregistrées de la demanderesse ainsi que son nom commercial, quoique qu’ils n’étaient pas visibles sur le site de la défenderesse. La Cour a déterminé que la défenderesse n’avait pas « employé » les marques de commerce et le nom commercial de la demanderesse sur son site internet par le biais de l’utilisation de métadonnées. Par conséquent, les recours en violation de marques de commerce et dépréciation de l’achalandage ont été rejetés puisqu’il n’y avait pas « emploi » des marques de commerce de la demanderesse en vertu de la Loi sur les marques de commerce, condition préalable et essentielle de ces recours. Pour le recours en passing off sous l’article 7(b) de la Loi sur les marques de commerce, la Cour a réitéré les trois éléments qui doivent être prouvés : (i) l’existence d’un achalandage, (ii) la vraisemblance de déception du public due à la représentation trompeuse, et (iii) des dommages actuels ou possibles. Selon la Cour, le nom commercial de la demanderesse Red Tag et les marques de commerce « redtag.ca » et « Shop. Compare. Payless!! Guaranteed. » avaient acquis l’achalandage nécessaire pour combler la première partie du test. Sur la question de la représentation trompeuse, il a été prouvé que l’usage par la défenderesse de l’expression « red tag » dans ses métadonnées redirigeait bien le trafic du site internet de la demanderesse vers celui de la défenderesse, tous deux offrant des services de voyages aux Canadiens. Le Juge Manson s’est attardé à la question de déterminer si l’usage dans les métadonnées des termes dominants des marques de commerce de la demanderesse et de son nom commercial était susceptible de causer de la déception. La Cour a reconnu de prime abord que l’usage de métadonnées dans des moteurs de recherche fournit aux consommateurs une liste d’hyperliens divers qu’ils peuvent sélectionner à leur gré et qu’elle ne réfère pas à un seul site internet spécifique. Quoique le classement de ces hyperliens sur une page de résultats d’un moteur de recherche puisse avoir un impact sur le choix de l’hyperlien à visiter par les consommateurs, ces derniers conservent la liberté de sélectionner l’hyperlien de leur choix. À cet égard, la Cour explique que : “…Accordingly, use of a competitor’s trademark or trade name in metatags does not, by itself, constitute a basis for a likelihood of confusion, because the consumer is still free to choose and purchase the goods or services from the website he or she initially searched for.” Pour ces motifs, la Cour a conclu qu’il n’y avait pas de vraisemblance de déception et a donc rejeté le recours en passing off. Nos réflexions sur la décision de la Cour fédérale (i) La protection par droit d’auteur des métadonnées Bien que le Juge Manson n’ait pas rejeté l’éventualité de métadonnées « originales », nous doutons que la majorité des métadonnées puissent bénéficier de la protection de la Loi sur le droit d’auteur au Canada. Les métadonnées, composées essentiellement de mots-clés descriptifs permettant un repérage de sites internet par les consommateurs, sont conçues pour influencer le comportement des moteurs de recherche. Les métadonnées sont des algorithmes 3 et à ce titre ne combleraient pas les critères élaborés par la jurisprudence. Il sera intéressant d’observer si les décisions futures apporteront des précisions sur ce que constitue des métadonnées « originales » permettant la protection du droit d’auteur au Canada. (ii) Usage de la marque de commerce et du nom commercial d’un compétiteur dans les métadonnées : une situation de concurrence déloyale? Le recours en passing off a été rejeté du fait que les métadonnées utilisées dans un moteur de recherche n’empêchent pas les consommateurs de choisir l’hyperlien qu’ils veulent explorer. La Cour a aussi rejeté les recours en violation de marques de commerce et dépréciation de l’achalandage puisqu’il n’y a pas d’emploi en vertu de la Loi sur les marques de commercepar la défenderesse du nom commercial et des marques de commerce de la demanderesse. Bien que nous soyons d’accord avec la position de la Cour fédérale à l’effet qu’il n’y a pas de violation de marques de commerce, nous nous demandons si une preuve solide des perceptions et réactions des consommateurs pourrait démontrer que les consommateurs pourraient être trompés, ce qui ouvrirait ainsi la porte à un recours en concurrence déloyale. Conclusion La demanderesse a logé un appel du jugement de la Cour fédérale. La Cour d’appel sera amenée à développer sur la question d’une protection des métadonnées par le régime de la propriété intellectuelle. Demeurez en ligne pour la suite… Red Label Vacations Inc. (redtag.ca) c. 411 Travel Buys Limited (411travelbuys.ca), 2015 FC 19 (CanLII). CCH Canadienne Ltée c. Barreau du Haut-Canada, 2004 CSC 13. Insurance Corp of British Columbia c. Stainton Ventures Ltd., 2012 BCSC 608.
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L’Affaire Oasis: Quand le jus tourne au vinaigre – L’impact des médias sociaux sur la justice
Deux sociétés Lassonde (ci-après Lassonde) , détentrices de la marque OASIS identifiant principalement des jus de fruits, intentent un recours judiciaire contre Oasis d’Olivia inc. pour demander à la Cour supérieure d’ordonner de cesser l’emploi de la marque OLIVIA’S OASIS pour du savon et de payer des dommages exemplaires et punitifs. Lassonde s’oppose aussi à l’enregistrement de la marque OLIVIA’S OASIS. Lassonde perd devant les deux instances. La Cour supérieure conclut qu’il y a abus de procédure et condamne Lassonde au paiement des honoraires extrajudiciaires et $25,000 en dommages punitifs. La Cour d’appel, uniquement saisie de la question des honoraires extrajudiciaires et des dommages, renverse la décision de la Cour supérieure considérant qu’il n’y a pas eu de preuve d’abus de procédure. A la suite de cette dernière décision, la presse écrite puis les médias sociaux s’emparent de l’affaire et expriment un tel mécontentement que Lassonde décide de battre en retraite et dédommage à l’amiable Oasis d’Olivia inc. La Cour d’appel n’a pas été convaincue qu’il y avait eu abus de procédure après analyse du comportement de Lassonde dans le cadre du dossier, de l’absence d’intimidation expresse et du fait que l’exercice de deux recours en parallèle était une pratique courante en la matière. La cour ajoute que puisque le juge de première instance a rendu un jugement en 50 paragraphes après 5 jours de procès et un long délibéré, la question juridique au coeur du débat ne devait pas être évidente. Ces évènements amènent les réflexions suivantes : 1. Le détenteur d’une marque de commerce doit exercer son jugement pour déterminer dans quelles situations il doit ester en justice et dans quelles situations il doit s’en abstenir. Lorsque le détenteur analyse cette question, il prend en compte ses chances de succès, l’importance du problème et les répercussions futures sur ses droits, etc. et il doit aussi composer avec l’impact possible d’un tel recours sur sa réputation. Cette considération n’est pas nouvelle mais elle gagne du poids depuis que les médias sociaux permettent de propager des informations comme une trainée de poudre 2. La Cour d’appel souligne que les recours pouvaient être justifiés pour renforcer l’identification de Lassonde à sa marque. Nous ajoutons que le détenteur d’une marque qui ne réagit pas lorsque ses droits sont bafoués peut voir ses droits amoindris sinon anéantis dans certaines circonstances. 3. La durée du procès dépend des efforts que les parties y mettent. Le long jugement s’explique par le fait que l’analyse du risque de confusion requiert l’étude de plusieurs critères et considérations, ce qui ne veut pas dire que la conclusion n’est pas facile à prévoir. Le long délibéré n’est pas en soi un facteur à considérer dans la question de l’abus de procédure puisqu’il peut avoir été causé par de multiples facteurs qui peuvent n’avoir aucun lien avec la cause (dont l’agenda de la juge). 4. L’article 54.1 du Code de procédure civile du Québec indique qu’un recours peut être abusif s’il est manifestement mal fondé. Comme les marques possèdent des différences notables au niveau phonétique, visuel et sémantique, que le terme OASIS a une signification dans le langage courant, que personne ne peut s’approprier ce terme, que les protagonistes offraient en vente leurs produits destinés à des fins et des clients différents, ne se retrouvant pas côte à côte dans les mêmes établissements et sans chevauchement de créneaux de distribution, nous nous interrogeons sur le fondement juridique de ce recours. Goudreau Gage Dubuc, l’un des plus importants cabinets en propriété intellectuelle au Canada, s'est joint à Lavery Avocats. Les deux cabinets ont intégré leurs opérations afin d’offrir une gamme complète de services juridiques à leurs clients. Le regroupement consolide l’approche multidisciplinaire de Lavery qui poursuit ainsi sa croissance en arrimant à son offre de services l’expertise d’avocats, d’agents de brevets et d’agents de marques de commerce dédiés au droit de la propriété intellectuelle et faisant partie d’une des équipes les plus réputées au pays. Pour en savoir plus, visitez le www.VosAvocatsEnPi.ca. --> 5. La preuve d’un abus de procédure peut s’avérer difficile à faire devant les tribunaux. On ne peut entraver indûment le recours aux tribunaux. 6. Les médias sociaux peuvent réagir à des situations qui paraissent injustes et l’impact des médias sociaux est puissant. Les opinions émises sur les médias sociaux ne prennent pas nécessairement en compte les règles de droit et de preuve et peuvent être contraires au droit et être injustes. Les médias sociaux peuvent mener à d’autres types d’abus par exemple lorsque les opinions qui sont véhiculées se préoccupent davantage du degré de sympathie des parties impliquées que des fondements du droit. 7. Bien utilisés, les médias sociaux peuvent être un outil intéressant pour qui veut faire valoir ses droits, en permettant la cueillette d’informations, en identifiant ceux qui reçoivent des mises en demeure similaires, ceux qui faute de moyens économiques décident de ne pas ester en justice ou ne pas se défendre et ainsi aider le justiciable à faire la preuve devant les tribunaux d’un abus de procédure !